UN PRESIDENT AUX ABONNES ABSENTS
24 avril 2013
Le Parlement a adopté définitivement, avec le droit au mariage pour les couples homosexuels, l’une de ces réformes qui, à l’instar de la légalisation de l’interruption volontaire de grossesse en 1974 ou de l’abolition de la peine de mort en 1981, changent la nature d’une société.
Ce débat politique majeur qui traverse les consciences, se sera déroulé en l’absence de celui qui l’a voulu. Il a fracturé la collectivité nationale sans qu’à aucun moment, sauf par deux ou trois phrases sibyllines au cours d’une interview fleuve, le chef de l’Etat n’ait cherché à expliquer aux Français les raisons de son engagement en faveur de l’union des personnes de même sexe. On aurait aimé l’entendre détailler les subtilités opaques d’une conviction qui le rend favorable au mariage des homosexuels, mais réservé sur leur droit à la procréation médicale assistée et franchement hostile à leur accorder la gestation pour autrui. On aurait aimé aussi l’entendre parler de ce sujet en conscience, autrement que pour évoquer, avant de se rétracter, la liberté des maires à ne pas célébrer ces mariages.
La France en crise ne comprend pas qu’un président élu sur la promesse de redresser le pays fasse du mariage la première grande affaire de son quinquennat. Pour tous, sauf pour lui-même, est-on tenté d’ajouter. Ses efforts de pédagogie, le chef de l’Etat les a réservés, jusqu’ici, à défendre ses choix économiques et ses mesures fiscales, dans l’espoir que les Français voient, derrière eux, une stratégie. Il a sous-estimé l’impact d’une réforme sociétale qu’il pensait faire passer comme une lettre à la poste et en négligeant autant qu’il le fait son accompagnement, il prend le risque de faire de l’exercice du pouvoir une pure tactique politique. Comme s’il suffisait, pour qu’une réforme soit acceptée par la société, qu’elle soit adoptée par le Parlement… Dans sa démarche, il a oublié le peuple. Comment s’étonner alors que celui-ci réagisse avec excès ?
Lors de la campagne présidentielle, le « mariage pour tous » avait été présenté comme un paisible symbole de la modernité culturelle. Il a, en réalité, rouvert la très ancienne fracture politique qui divise la France au moins depuis la loi sur la laïcité de 1905. Plus grave encore, il a réveillé les pires sentiments homophobes. Le mieux que l’on puisse espérer désormais eserait que l’actualité passe à autre chose, ce qui n’est pas avéré pour une réforme qui était au départ largement approuvée dans les sondages et qui ne l’est plus. La mobilisation qu'elle a suscitée ne retombera pas de sitôt.
Comment ce fin politique et habile manœuvrier a-t-il pu laisser enfler la vague protestataire sans tenter de la faire retomber ? Manque de conviction, peu de goût pour le sujet ? Les deux probablement, mais ce n’est pas suffisant face à la raison politique, et particulièrement au moment où il est au plus bas dans l’opinion publique, son silence contribuant d’ailleurs à accentuer un plongeon qui trouve son explication dans l’échec de la politique économique.
A moins que… Il y ait une autre explication. Le Monde du 5 avril a levé un coin du voile. Le lobby puissant qui œuvrait dans l’ombre pour le mariage des homosexuels avait trouvé, outre Pierre Bergé, un puissant allié pour influencer le président. Il s’agit de Jean-Jacques Augier, de la fameuse promotion Voltaire de l’ENA. Militant du mariage pour tous, pacsé avec son compagnon chinois, Xi Shu, patron de la revue Têtu, achetée à Pierre Bergé, éditeur, homme d’affaire et ancien patron de G7, c’est lui que François Hollande a choisi avec son ami Bernard Cottin, pour s’occuper du financement de sa campagne. Peut-on refuser quelque chose à quelqu’un qui vous trouve en quelques semaines 500 000 € pour votre campagne électorale ?
Ce qui pourrait expliquer à la fois le silence et la détermination à aller jusqu’au bout.
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