HISTOIRE
ARCHIBALD SE LACHE
LE BOUFFON NE FAIT PLUS RIRE

L’ONDE DE CHOC DU CAS CAHUZAC

 

Cahuzac

Evidemment, il y a le mensonge. Un vrai mensonge, un gros mensonge, droit dans les yeux, dont les images tournent en boucle pour que nous puissions bien nous en imprégner. Comme si nous n’étions pas suffisamment sidérés qu’un tel aplomb puisse exister. En plus commis par le ministre du Budget au moment où le budget est affaire d’Etat plus que tout. Alors le mensonge d’un homme devient mensonge d’Etat. C’est la suite qui ne va pas ! Révèle-t-il comme on voudrait nous le faire admettre à la fois l’insalubrité politique de la France et la constitution d’une nouvelle nomenklatura qui se croit tout permis et notamment de faire ce qu’elle prétend anéantir. Jérôme Cahuzac ne serait pas un cas isolé ? On apprend aussi que l’ex-trésorier de la campagne de François Hollande en 2012 a créé deux sociétés aux îles Caïmans pour des marchés avec un partenaire chinois : il faudrait d’urgence trouver quelqu’un qui aille expliquer à Arnaud Montebourg l’on peut être de gauche et adorer la mondialisation ? L'ironie est tentante. Mais cela entache-t-il la classe politique toute entière ? C’est ce que voudraient nous faire croire les deux clowns qui nous gouvernent et leurs comparses pour s’exonérer de la responsabilité de fréquentations qui ne correspondent vraiment pas aux discours qu’ils tiennent. Le strip-tease fiscal qu'ils proposent ne constituera jamais un brevet d'intégrité et d'honnêteté. Le pingouin veut de la "transparence" : avec le sombre Ayrault, il est servi.

La réalité, c’est que des milliers de Français fuient le délire fiscal.

Il y a peut-être encore au gouvernement ou parmi les élus des Français qui, comme beaucoup d’autres, ont ou ont eu, un compte occulte à l’étranger. La réalité c’est que de très nombreuses familles, des milliers probablement, détiennent encore des sommes plus ou moins importantes accumulées à l’étranger depuis longtemps, pour des motifs divers et pas seulement fiscaux. Il ne sert à rien de le nier. Et à vouloir spolier les titulaires de ces comptes pour prix de leur faute, ceux-ci quitteront la France ou enfouiront leurs fonds encore un peu plus profond. D’ailleurs, il y aurait moins d’argent dissimulé si ceux qui le possèdent étaient moins taxés en France, s’ils y étaient moins vilipendés aussi pour leur fortune. Il vaudrait bien mieux profiter de l’occasion pour permettre à tous ceux qui ont encore des comptes à l’étranger de les rapatrier dans des conditions raisonnables, alors que désormais ils n’osent plus s’aventurer dans ces démarches, après que Bercy a supprimé l’anonymat et fermé l’accès à sa cellule dédiée à cet effet. S’il était proposé, par exemple, que toute régularisation engagée dans l’année soit traitée dans un délai court et à un coût égal à 50 % des revenus (intérêts, dividendes, plus-values) réalisés sur ces comptes depuis 2006, une telle mesure pourrait rapporter des milliards d’euros. Le budget français profiterait mieux de telles mesures concrètes que d’imprécations tonitruantes contre des pratiques surannées et irrégulières, mais courantes jusqu’à ces dernières années. N’est-ce pas le bon moment pour récupérer des sommes importantes tout de suite et élargir l’assiette fiscale pour l’avenir ? La politique et la morale ne trouveraient-elles pas leur compte à parler et à régler ouvertement ces questions qui fâchent ?

C’est aussi le symbole de l’échec d’une politique.

Car l’affaire Cahuzac intervient au pire moment. Celui où la France a besoin de rassembler ses forces pour rester dans la course de la mondialisation et trouver un minimum de consensus pour lancer les réformes nécessaires. La hausse massive des impôts décidée depuis l’été dernier s’est révélée contre-productive avant même que certaines mesures n’entrent en vigueur – le relèvement de la TVA en 2014. Chacun a-t-il conscience que la machine économique fait du surplace et même qu’elle a légèrement reculé ? Cela n’était pourtant jamais arrivé depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. Cette politique désastreuse avait néanmoins un semblant de justification si, pour redresser les comptes, une remise en ordre des dépenses publiques était en même temps engagée. Mais cela n’a pas été le cas jusqu’à présent. Alors nul besoin d’être grand clerc pour comprendre que l’opinion sera peu conciliante pour accepter des nouvelles augmentations d’impôt, diminuer les allocations familiales ou autres aides, quand Le ministre du Budget cachait de l’argent à Singapour… Un raccourci qui n’a aucun sens économique mais alimente les mouvements d’humeur de nos concitoyens. La question qui se pose est moins celle du petit jeu du « qui savait quoi et quand » que celle du climat délétère actuel, qui est une catastrophe pour la confiance, sans laquelle il n’y aura tout simplement pas de rebond. Il ne faudrait pas non plus que cette situation  donne des ailes à ceux qui pensent que le moment est venu de renoncer aux efforts, notamment en faveur de la compétitivité, déjà trop limités à l’heure actuelle. C’est sans doute le pire qui pourrait arriver : croire que l’on pourrait s’en sortir sans effort.

Les populistes sont en embuscade.

Il y a un autre danger. A vouloir jeter l’opprobre sur tous les élus, comme le fait Mélenchon, et comme s’y emploie dans un autre registre l’exécutif, on apporte de l’eau au moulin du populisme. Tout populisme, quelle que soit sa couleur, repose sur trois piliers : un programme démagogique, un ton tonitruant, un rejet hargneux et méprisant du « système » politique. L’occasion est trop belle. Pendant la campagne présidentielle, le candidat Jean-Luc Mélenchon avait annoncé une « opération nettoyage » contre le Front national et traité Marine Le Pen de « semi-démente ».Aujourd’hui il prêche pour un « grand coup de balai ». Mais à qui ce discours profite-t-il ? Même si ce constat fait hurler d’indignation ses partisans, on peut affirmer que le leader du Parti de gauche apporte de l’eau au moulin du FN. La récente élection législative partielle dans l’Oise n’en est qu’un signe parmi d’autres. Il existe des différences entre le programme du FN et celui de Mélenchon mais le citoyen lambda retient surtout leur condamnation commune des politiques nationale et européenne, la violence du discours et la diatribe contre la classe politique – le « tous pourris » (ou « tous salopards »). Sur ces deux points, tout se passe comme si Marine Le Pen avait sous-traité le travail à Jean-Luc Mélenchon : elle-même a adopté très adroitement un ton beaucoup plus modéré, pour accélérer la banalisation de son parti. Elle évite même les excès du discours « antisystème ». Pour résumer, on pourrait dire que Mélenchon amplifie les mécontentements et « chauffe la salle », mais c’est Marine Le Pen qui recueille les applaudissements…

Avec tout ce spectacle, on entre dans la catégorie « tragédie ». Car on meurt tous à la fin.

 

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