LE FESTIVAL DE KAHN N’EST PAS FINI
07 juin 2011
« Not guilty ». Deux mots et rien de plus. L’audience de comparution s’est soldée comme prévu par cette stratégie de défense pour DSK. Mais avant d’en arriver là, que de cinéma médiatique. Tous les journaux nous ont refait l’historique de l’affaire, nous rediffusant en boucle les mêmes images déjà vues mille fois, rajoutant pour l’une tel détail croustillant, pour l’autre tel commentaire d’un spécialiste avisé… Même « Complément d’enquête » s’est fendu d’une « spéciale ». Les dés judiciaires sont jetés, c’est-à-dire que le « présumé coupable » s’est engagé dans un long temps de démêlés avec le système judiciaire américain, c’est dire qu’on n’a pas fini d’en parler ! Prochain rendez-vous le 18 juillet avec le même tam-tam.
Des heures de prime time consacrées à « l’affaire ». La planète connaît pourtant des drames bien plus graves dont on devrait nous informer. Mais le nombril français étant le plus beau du monde… En fait, les médias comme la classe politique, comme beaucoup de Français, comme moi, ne sont pas sortis de l’état de sidération dans lequel nous a plongés le « champion » qui était déjà « président » dans un grand nombre de têtes. Grave erreur.
Même s’il est innocent, DSK ne pourra plus être candidat.
Donc retour à la réalité. On avait fini par oublier que DSK n’avait pas encore été élu président de la République, pas plus qu’il n’avait remporté la primaire socialiste. Sa course s’est arrêtée alors qu’il n’avait même pas déclaré sa candidature. Et on ne saura jamais ce qu’il avait vraiment décidé. Mais par la magie des sondages, et bien qu’absent du débat national, il structurait notre vie politique. Prenons le cas de Mélenchon : c’est un coup dur pour lui. Avec la disparition de son punching ball, il est obligé de repenser toute son argumentation. De même du côté de l’Elysée où l’on se préparait à affronter le « favori » en appuyant sur ses points faibles furieusement mis en lumière sous le ciel new-yorkais : argent, sexe, pour ne citer que ceux-là.
Sans DSK, le PS boîte.
Les socialistes doivent vivre, quoi qu’ils en disent avec l’actualité qui viendra régulièrement d’outre Atlantique. Quelques excès comme la location de la maison nuisent à leur crédit et tendent à éclipser tout le travail fait autour du programme. Il leur va falloir trouver un nouveau champion, voir une championne, puisque « l’amère de Lille » devrait enfin se dévoiler cette semaine. Mais le PS ne manque pas de candidats et la disparition de celui qui planait à 3 000 m au-dessus d’eux peut aiguiser les appétits. Désormais, il manque une dimension au PS et elle crée un espace au centre gauche. Et puis les haines aujourd’hui rentrées pour cause de façade unitaire vont bien ressortir pendant la campagne des primaires. Inévitablement. Sinon comment se différencier dès lors que l’on se réfère à un même programme. On voit quelques lignes de front se dessiner, comme à Poitiers. Laissons-les à leur poker menteur.
Borloo voudrait croire à la providence.
Ce contexte inattendu élargit opportunément l’espace du Président du Parti Radical qui se sent pousser des ailes. Sa confédération centriste de micro-partis-sans-troupes, sorte de néo-UDF version Tom Pouce, espère intéressé un électeur sur cinq. On est plus dans le rêve que dans la réalité. Et ce n’est pas en essayant de récupérer Villepin dont l’audience ne décolle pas et qui est centriste comme moi marchand de petits pois, qu’il va élargir son spectre électoral. Candidat pour une réserve de 2ème tour, c’est déjà se limiter à un rôle de faire valoir. La question est de savoir si, dans l’esprit des Français il peut incarner un Président possible. On en est loin. D’autant plus que le radical laïc qu’il est campe sur un électorat essentiellement démocrate-chrétien qui ne lui est pas acquis naturellement. Louvoyer permet d’attendre le vent. Viendra-t-il ?
Et pendant ce temps-là, à New-York…
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