LA DEMOCRATIE FACE AUX FANATISMES
02 juillet 2009
Voilà un ouvrage que les membres de la commission d’enquête parlementaire sur la « burqa » devraient lire. « La guerre du doute et de la certitude » d’André Grjebine analyse les grandes religions révélées avec un esprit critique dénué de tout préjugé, ce qui peut en faire un ouvrage de référence. L’auteur, économiste de son état, n’en est pas à son coup d’essai. Ce dernier livre fait suite à deux autres (« Un monde sans dieu » et « le défi de l’incroyance »). Il s’inquiète du fanatisme religieux et de ses conséquences et sa quête s’appuie sur une érudition assez extraordinaire qui va de la Torah aux deux Testaments en passant par le Coran, voire d’écrits de spécialistes éminents des religions ou encore d’auteurs notoires comme Tocqueville. Cela ne rend pas son ouvrage d’un accès nécessairement facile, mais c’est une contribution remarquable sur un problème dont l’actualité n’est pas à démontrer.
Il aboutit évidemment à une conclusion qui ne saurait nous surprendre, à savoir la supériorité de la raison sur la révélation, sans négliger l’apport des religions ni les condamner au regard de l’Histoire. Cette modération ne devrait pas dissuader les fervents croyants d’entrer dans la lecture de son ouvrage avec profit. Si nous savons déjà que la laïcité autorise toutes les communautés religieuses à cohabiter au sein d’une même communauté nationale, encore faut-il, pour la défendre avec obstination, être capable de savoir ce qui différencie un musulman d’un catholique, un juif des autres et un protestant des précédents…Une manière de nous souvenir que les haines religieuses sont très anciennes –rappelons-nous la St-Barthélemy- et que leur influence sur le comportement des nations a été permanente. La preuve : on en parle encore.
Grjebine nous démontre que les sociétés ouvertes sont vulnérables face aux sociétés « fermées », parce qu’elles pratiquent la tolérance dont le tout religieux peut se saisir. Et il explique « que la confrontation ne s’apparente pas à une guerre des religions, mais oppose la société ouverte aux mouvements politico-religieux les plus éloignés de la modernité… Nous sommes contaminés par l’intolérance religieuse ». La conséquence c’est que nous n’osons plus soumettre l’islam à l’analyse critique que nous faisons subir aux autres religions, avec l’inversion des valeurs et des rôles comme corollaires. Le choix de la laïcité reste donc impératif à ses yeux, car la bataille du doute et de la certitude n’est rien d’autre que celle, à armes inégales, du scepticisme contre le fanatisme. Quand un groupe brandit sa foi, ce n’est pas de Dieu qu’il tient sa légitimité, c’est de ce qu’il croit détenir de Dieu et dont personne n’a la preuve. En résumé, ceux qui ne sont sûrs de rien ne peuvent opposer la même conviction mise au service de la force, à ceux qui se croient au service d’un Dieu au nom de qui ils peuvent commettre les pires méfaits …. Ceux qui iront jusqu’au bout trouveront un soutien intellectuel et moral dans leur refus de céder à l’intolérance. Ce qui n’est pas mince ! Publié chez Berg International.
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