HISTOIRE
CIRCULEZ….
REPUBLIQUE LAIQUE…

BIOETHIQUE


  Jeanneteau2                                                                       

 

 

Paul JEANNETEAU, député de la 1ère circonscription de Maine-et-Loire, est membre de la « Mission d’information sur la révision de la Loi de bioéthique ». Parmi les 30 députés qui la composent autour d’un président et d’un vice-président, il est l’un des 4 qui ont suivi le plus assidûment la soixantaine d’auditions.

Interview exclusive pour le bloc-notes.

DH. Paul Jeanneteau, pourquoi est-il nécessaire de revisiter les lois  de bioéthique de 2004 ?

P1050493 "Les questions soulevées par les progrès scientifiques et techniques ont alimenté le débat public qui a abouti en 1994 au vote de trois lois de bioéthique. Afin que l'équilibre trouvé n'entrave pas la dynamique de la recherche, le législateur a alors inscrit, dans la loi relative au don et à l'utilisation des éléments et produits du corps humain, à l'assistance médicale à la procréation et au diagnostic prénatal, le principe de sa révision au bout de 5 ans. Son article 21 stipule : « la présente loi fera l’objet….d’un nouvel examen par le parlement dans un délai maximum de 5 ans après son entrée en vigueur ». On peut supposer, également, que le législateur craignait d'être dépassé par les progrès technologiques et scientifiques."

DH. Qu'en est-il du statut des enfants nés par mères porteuses à leur retour en France?

P1050495 "Actuellement, le père peut reconnaître l'enfant, à sa naissance. Par conséquent, il devient  juridiquement le père de l'enfant, dans tous ses droits. En revanche, la femme qui reçoit cet enfant ne peut pas être reconnue comme mère puisque le droit stipule que la mère est la femme qui accouche. La femme qui a recouru à une gestation pour autrui à l'étranger n'a aucun statut parental donc aucune autorité parentale.

Pour ma part, je pense que si l'on reconnaît juridiquement la femme qui accueille l'enfant comme sa mère légale, alors, implicitement, la gestation pour autrui est reconnue. La solution serait sans doute de conférer à cette femme une délégation d'autorité parentale, au terme d’un jugement rendu par le juge aux affaires familiales, comme le permet la loi du 4 mars 2002, relative à l'autorité parentale. Cela permettrait de régler les problèmes de la vie quotidienne sans pour autant procéder à une adoption pleine et entière."

DH. Quels sont les gardes fous qui vous paraissent absolument nécessaires  à opposer aux prouesses scientifiques?

P1050497  "Il me semble qu'il ne faut pas déroger aux principes consacrés par la loi de 1994, à savoir le respect de la dignité de la personne, l'anonymat et la gratuité des dons, quels qu'ils soient, l'indisponibilité du corps humain, c'est-à-dire l'interdiction de sa marchandisation. Il faut affirmer clairement que le corps humain n’est pas une propriété, ce n’est pas un instrument ou un moyen pour autrui. Le corps humain ne peut être aliéné c'est-à-dire ni donné ni vendu.

Par ailleurs, il me semble très important que le législateur ne traite pas ces questions de bioéthique de façon compassionnelle, ce qui pourrait être très dangereux, mais, bien évidemment, avec profondément d’humanisme.

Les progrès des sciences de la vie, posent des questions éthiques et morales. Afin d'éclairer les chercheurs, les médecins, les patients et plus généralement notre société, la loi de 1994

a instauré un cadre précis. Cependant, il ne faut pas oublier le rôle essentiel :

- du Comité Consultatif National d'Ethique qui émet des avis sur les différents dossiers qui lui sont soumis,

- et de l'Agence de Biomédecine qui valide ou non et contrôle la mise en oeuvre des protocoles de recherche."

DH. Quelles limites fixer aux recherches sur l'embryon?

P1050498  "Il serait plus exact de parler de recherche sur les cellules souches embryonnaires. Les recherches se font sur des embryons au stade de blastocyte, c'est-à-dire lorsqu’ils sont composés de 6 à 8 cellules.

Je pense qu'il ne faut pas créer d'embryons pour la recherche. Les techniques d'aide à la procréation doivent rester dans le champ de la thérapie, et cela d'autant plus que des milliers d'embryons surnuméraires sont détruits, faute de projet parental. Il me semble plus judicieux de réaliser les recherches sur ces embryons, aujourd’hui voués à la destruction.

Ne faut-il pas, d'ailleurs, se demander où se situe la transgression? Est-elle dans la recherche sur des cellules souches embryonnaires provenant d'embryons congelés ou dans la congélation même d'embryons?

Aujourd’hui, les chercheurs prélèvent une seule cellule dans un blastocyte qui en contient huit et bien sûr en aucun cas cet embryon n’est réimplanté dans l’utérus de la mère.

Je comprends que cela puisse poser des problèmes éthiques, mais l’interdiction absolue de recherche sur les cellules souches me semblerait surprenante dans notre pays qui autorise l'avortement jusqu'à 12 semaines.

Dans la prochaine loi de bioéthique, à mon avis, il faudrait maintenir le principe de l'interdiction de procéder à des recherches sur les cellules souches embryonnaires, en maintenant un système dérogatoire, les recherches permises devant avoir une finalité médicale.

Dans le domaine de l'aide médicale à la procréation, il est souhaitable de développer la recherche afin de limiter au maximum la création d'embryons surnuméraires. La technique de la vitrification des ovocytes est une voie qui semble porteuse d’espoir. Cela consiste en une congélation ultrarapide des ovocytes qui peuvent être ainsi conservé pour une utilisation future. Différentes équipes utilisent, d’ores et déjà, cette technique avec des résultats très intéressants."

DH. Faut-il séparer  acte sexuel et procréation?

P1050503 "La loi du 6 août 2004 (art. 24) stipule que l'assistance médicale à la procréation a pour objet de remédier à l’infertilité dont le caractère pathologique a été médicalement diagnostiqué. Elle  est réservée aux couples mariés ou vivant ensemble depuis au moins deux ans et en âge de procréer. Le couple doit être constitué d'un homme et d'une femme, cette dernière devant  être âgée de moins de 43 ans.

L'AMP doit rester dans le champ thérapeutique, c'est-à-dire soigner la stérilité d'un couple ou éviter la transmission à l’enfant ou à un membre du couple d’une maladie d’une particulière gravité.

Je ne suis donc pas favorable à l'ouverture, aux couples homosexuels, de l'aide médicale à la procréation (AMP), d’autant plus qu’à mes yeux, pour se construire l’enfant a besoin de se confronter à l’altérité. Je ne suis pas favorable, également, au transfert d’embryon post-mortem : les limites de la procréation médicale assistée doivent être les limites de la vie.

Il faut être vigilant à ce que n'émerge pas un droit à l'enfant mais veiller aux droits de l’enfant à naître. C’est aussi cela la responsabilité du législateur."

DH. Quels principes intangibles pourraient servir de socle au droit, évitant ainsi la course permanente entre  les lois et le progrès scientifique?

P1050504   "Au fur et à mesure que la science progresse, les lois de bioéthique ne peuvent évoluer, constamment, vers un élargissement de la permissivité. Leur rôle est de stipuler ce qui est interdit plus encore que ce qui est permis, elles doivent fixer un cadre, en définissant un certain nombre de principes fondamentaux : gratuité, anonymat, non commercialisation du corps humain, dignité de la personne.

En s’appuyant sur les valeurs qui fondent notre société française, sur ce qui constitue notre vivre ensemble, les lois de bioéthique doivent être la traduction, par le législateur, d’un consensus sociétal."


                                                                        

 

Commentaires

Vérifiez votre commentaire

Aperçu de votre commentaire

Ceci est un essai. Votre commentaire n'a pas encore été déposé.

En cours...
Votre commentaire n'a pas été déposé. Type d'erreur:
Votre commentaire a été enregistré. Poster un autre commentaire

Le code de confirmation que vous avez saisi ne correspond pas. Merci de recommencer.

Pour poster votre commentaire l'étape finale consiste à saisir exactement les lettres et chiffres que vous voyez sur l'image ci-dessous. Ceci permet de lutter contre les spams automatisés.

Difficile à lire? Voir un autre code.

En cours...

Poster un commentaire

Vos informations

(Le nom et l'adresse email sont obligatoires. L'adresse email ne sera pas affichée avec le commentaire.)