LA POLITIQUE AUTREMENT
17 mars 2008
Je vous livre cette réflexion de Jean-Noël AMADEI qui mérite qu'on s'y arrête.
Jean-Noël AMADEI
"Les élections municipales sont souvent l’occasion d’alliances étranges, la défense des intérêts locaux permettant à des candidats de bonne volonté de partir ensemble solliciter les suffrages des électeurs, mais offrant aussi parfois un alibi bien pratique pour ceux qui sont prêts à tout ralliement pourvu qu’il assure un siège !
C’est ainsi, les scrutins de liste ont toujours permis cela, on ne voit pas pourquoi cela changerait !
L’autre caractéristique des élections municipales est le foisonnement de listes n’ayant entre elles que des différences de détails, chou vert et vert chou comme disent nos amis belges, la caractéristique essentielle et non négociable étant avant tout l’ego surdimensionné d’une tête de liste se jugeant providentielle, souvent jusqu’au moment où les électeurs en décident autrement !
Le législateur ayant, dans un élan pervers, prévu la possibilité de fusion de listes entre les deux tours, tous les ingrédients sont là pour que la cuisine post premier tour soit un exemple de gastronomie indigne du patrimoine de l’humanité, dommage pour l’UNESCO. Une fois de plus, les amateurs d’épices étranges n’ont pas été déçus.
On a vu des partis accorder au second tour leur soutien à la liste contre laquelle ils appelaient à voter au premier, laissant en plan leur candidat initial, quand ils ne l’ont pas fait dès avant le premier tour.
On a vu des listes vraiment opposées, fondamentalement différentes, se fondre en une seule autour d’un plus grand commun dénominateur proche du zéro.
On a vu un parti prétendant incarner la politique autrement faire le grand écart pour subsister à défaut d’exister, se vendant ici ou là au plus offrant, gauche, droite, gauche, droite, brouillant encore plus l’image que les électeurs peuvent avoir de lui, comme si sa seule stratégie était d’avoir des élus, faisant sien le célèbre distique de Musset :
« Aimer est le grand point, qu'importe la maîtresse ?
Qu'importe le flacon pourvu qu'on ait l'ivresse ? ».
Comment expliquer si ce n’est ainsi la propension de ce parti à recruter à tout va, à servir de refuge aux recalés de l’investiture, à mêler allégrement ex-verts, ex-ps, ex-ump, à présenter des listes partout où il le pouvait pour se mettre en position de négocier au second tour ? la présence à tout prix ! Présence sans aucune chance au premier tour, au risque de compliquer le choix des électeurs, négociations sans gloire pour assurer des sièges entre les deux tours, pseudo rejet offusqué des alliances quand les négociations n’amènent pas de sièges certains … si c’est ainsi qu’on fait de la politique autrement, qu’il nous soit permis de préférer la vieille façon, le débat d’idées, le débat de projets.
C’est vrai au niveau national, ça l’est aussi au niveau local, même si les enjeux sont différents, même si les querelles purement partisanes n’y sont pas nécessairement de mise.
On a beaucoup, cette fois encore, mis en évidence le nombre élevé d’électeurs ne s’étant pas déplacés. Qu’on ne s’y trompe pas, dans les abstentionnistes il y avait des vacanciers ayant omis de faire des procurations, des adeptes du « machin va gagner, inutile de se déplacer », mais il y avait aussi des électeurs perdus entre les listes interchangeables, des électeurs refusant les alliances de circonstance, des gens conscients de l’importance de leur vote qu’on éloigne ainsi peu à peu de leur devoir civique.
La clarté du débat, les enjeux précis, les candidats bien identifiables, sont les clefs d’un scrutin sincère qui intéresse les électeurs. A refuser cette règle du jeu, ceux qui confondent politique et cuisine prennent la responsabilité d’augmenter le nombre des abstentionnistes, au lieu de rénover la politique, ils en minent les bases.
C’est plus qu’une erreur de stratégie politique, c’est une faute contre la démocratie"
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