HISTOIRE
LE FLEAU TIKTOK
JOYEUX NOEL !

« FAITES-LES LIRE ! »

Faites les lire

Le livre de Michel DESMURGET est suffisamment alarmant pour que l’injonction soit prise au sérieux. Ce docteur en neurosciences, directeur de recherches à l’Inserm, a publié un ouvrage  solide appuyé sur une solide documentation scientifique, et délivre un message sans appel :  oui, les écrans ont un effet délétère  quand  ils font l’objet d’un emploi abusif –ce qui est le cas- et oui, il faut que nos enfants lisent  si  l’on ne veut pas voir s’amplifier  la baisse du développement cognitif que les dernières études Pisa mettent en évidence.

Et son étude est formelle : rien ne remplace le livre écrit !

Bien qu’il soit né il y a quatre mille ans, son objectif originel reste le même : préserver notre  mémoire collective, assurer la conservation et la transmission des savoirs les plus fondamentaux. C’est sur les livres que s’est édifié notre modernité et il y a toutes les chances que cela continue encore longtemps parce qu’il existe une parfaite adéquation de la structure du livre à notre fonctionnement cérébral. En privant nos descendants de littérature,  en ne les guidant pas sur les chemins du livre, c’est d’une partie de leur âme que nous les amputons.

Pire, c’est un  processus d’asservissement qui se  met en place quand on empêche les enfants les plus pauvres d’accéder aux richesses de la culture et du langage car  on cadenasse toute réelle perspective de mobilité sociale. C’est dans les livres que se cachent les richesses de la langue, tant au plan syntaxique que lexical.  Lorsque la lecture manque, le langage souffre. Or ce dernier soutient une part essentielle de nos capacités à raisonner, comprendre, critiquer, réfléchir, analyser et apprendre. Il faut donc éviter le cercle vicieux : plus l’esprit est privé de livres, plus son assise culturelle et langagière s’érode, et plus cette assise s’érode moins le savoir des livres se révèle accessible. 

Inlassablement, le mouvement se répète : le lecteur s’élève,  l’idiot s’abîme. Or nos enfants ne lisent plus ou trop peu ; leur cerveau est abruti d’écrans récréatifs ;  leur existence s’écoule à leur insu sous une constante surveillance numérique. Et leurs rêves s’amenuisent de plus  en plus.  Ils seront « ceux qui existent sans vivre » et subissent déjà, comme disait Victor Hugo, « le sombre accablement d’être en ne pensant pas ».

Les avantages du livre.

Mieux qu’internet. Une différence majeure entre le livre et Internet tient à l’organisation des contenus. Sur la toile l’information est diffuse, redondante et morcelée. Le détail se  mêle au fondamental et les fake news se mélangent sans cesse au véridique.  Les savoirs ne sont ni coordonnés ni hiérarchisés. Les livres sont bien moins exigeants pour le lecteur, la totalité  du travail de recherche étant assurée  par l’auteur. Autrement dit, le  livre guide sur le chemin en assurant un niveau optimal d’intelligibilité. Son format linéaire reste le plus adapté à l’acquisition des connaissances.

Mieux que l’oral. A partir du collège, lorsque les lecteurs ont une qualification suffisante, l’écrit améliore, par rapport à l’oral, les niveaux de compréhension et de mémorisation. La plupart des études ont conclu que nous retenons mieux lorsque nous lisons. Le traitement de l’écrit demande un niveau de concentration plus élevé que celui de l’oral, ce qui favorise la mémorisation.

Le papier mieux que l’écran. Les avantages du livre papier sont multiples. Ils sont parfaitement autonomes et ne requièrent ni batterie, ni compétences informatiques, permettent de surligner et d’annoter le texte… Et ils ignorent la désuétude alors que les textes numériques sont mécaniquement condamnés à une obsolescence précoce par la fragilité des supports de conservation, l’incessante transformation des matériels et des formats de stockage. Enfin, il a été établi qu’un même texte tendait à être lu plus rapidement sur écran que sur papier, mais au détriment de la compréhension. Plus l’énoncé est exigeant, plus la supériorité du papier devient notable. Pour la lecture partagée, les livres imprimés sont fortement préférables aux  livres électroniques pour les jeunes enfants. L’écran rend plus difficile, parce qu’il constitue lui-même un objet d’intérêt, la construction d’une association symbolique entre l’objet et l’image.

En conclusion, le livre reste le  support d’apprentissage le plus adapté à notre fonctionnement cérébral. Sa structure linéaire, pré-organisée et sa capacité à mobiliser l’attention lui confèrent un avantage substantiel sur les médias audio ou vidéo  et les formats disloqués d’Internet, notamment pour l’assimilation des connaissances complexes et exigeantes.

Construire la pensée.

La lecture offre un terreau propice et irremplaçable à la construction du langage, des savoirs  généraux et de la pensée.

Accroître l’intelligence. La lecture accroît la part du QI appelée QI verbal ou ICV (Indice de Compréhension Verbale).  Plus l’enfant lit, plus son intelligence s’étoffe  et  plus lire devient plaisant. Cet apport du livre à l’intelligence est unique et irremplaçable.  Soit l’enfant lit, soit il se condamne à ne jamais déployer son plein potentiel intellectuel.

Enrichir le langage. Plus le volume de pratique est massif, plus la qualité lexicale s’affine et plus la lecture est efficiente.  Les bons lecteurs produisent une syntaxe plus élaborée et ont une orthographe plus fiable.  Les données montrent, en effet, que le niveau de mémorisation est plus important chez les enfants disposant du plus large répertoire orthographique initial. Avant de vouloir écrire, mieux vaudrait aussi s’assurer une longue et  intense familiarité avec la lecture. Et ce sont les livres de fiction qui engendrent les gains  les plus substantiels sur le langage.  Une étude récente montre que les magazines et les bandes dessinées n’ont aucun effet sur les performances des élèves ; les journaux ont un impact modeste et les livres  non fictionnels produisent des effets  médians. Autrement dit, sans livres, pas de langage évolué : si le cerveau de l’enfant ne rencontre pas assez d’ouvrages, notamment de fiction, son développement langagier et sa capacité à apprendre à lire seront grandement compromis. Pour acquérir plus que l’ordinaire, c’est vers l’écrit que l’enfant doit se tourner, d’abord sous forme de lecture partagée  et ensuite à travers sa pratique personnelle.  Ce n’est pas une option, c’est une obligation.

Engranger des connaissances et stimuler la créativité. Il est absolument impossible de débattre, de réfléchir ou   plus globalement d’avoir une vie intellectuelle féconde sans un solide répertoire de connaissances générales. Sur le plan scientifique, l’impact de la lecture sur notre stock de connaissances est aujourd’hui solidement démontré.

Pour conclure :  tout ne se vaut pas !

Certains usages n’ont aucune influence sur le déploiement intellectuel ; d’autres agissent négativement, d’autres se révèlent bénéfiques. Les thèses relativistes actuelles peuvent satisfaire les idéaux égalitaristes mais en profondeur, elles constituent d’implacables machines à produire des inégalités. Une pierre d’achoppement entre les réalités neuroscientifiques et les thèses du sociologue Pierre  Bourdieu.

Les  premiers chapitres du livre sont consacrés à « la lente agonie de la lecture » et à «  l’art de la lecture » à la lumière des multiples études neuroscientifiques. Des constats édifiants. 

« Faites-les lire ! » Pour en finir avec le crétin digital. Michel Desmurget.  Ed. du Seuil

 

Commentaires

Vérifiez votre commentaire

Aperçu de votre commentaire

Ceci est un essai. Votre commentaire n'a pas encore été déposé.

En cours...
Votre commentaire n'a pas été déposé. Type d'erreur:
Votre commentaire a été enregistré. Poster un autre commentaire

Le code de confirmation que vous avez saisi ne correspond pas. Merci de recommencer.

Pour poster votre commentaire l'étape finale consiste à saisir exactement les lettres et chiffres que vous voyez sur l'image ci-dessous. Ceci permet de lutter contre les spams automatisés.

Difficile à lire? Voir un autre code.

En cours...

Poster un commentaire

Vos informations

(Le nom et l'adresse email sont obligatoires. L'adresse email ne sera pas affichée avec le commentaire.)