Qui est de mauvaise foi ?
22 janvier 2009
Voici la déclaration intégrale faite hier dans l’hémicycle
par le Premier Ministre. Elle contient tous les éléments dont il est question
et permet d’évaluer à sa juste valeur le jeu de l’opposition. C‘est un peu
long, mais la lecture en vaut la peine.
Déclaration du Premier ministre à l’Assemblée nationale
concernant la réforme constitutionnelle
« Monsieur le président,
Mesdames et Messieurs les députés,
Nous nous faisons tous, ici, sur ces bancs une haute
idée de la démocratie et une haute idée du lieu dans lequel cette démocratie
s’exerce principalement, c’est-à-dire l’Assemblée nationale. Il est normal que
dans cet Hémicycle, les débats soient vifs. C’est légitime. Mais en revanche,
que ces débats tournent à l’affrontement, que ces débats tournent au blocage,
que ces débats tournent à l’injure et notamment à l’endroit du président de
l’Assemblée nationale, cela est inacceptable, cela ne grandit pas le Parlement
et cela ne grandit personne. Il se trouve que j’ai siégé sur ces bancs plus
longtemps que la majorité d’entre vous, et ce n’est pas la première fois que je
vois l’opposition sortir de ses gonds et en appeler à la sauvegarde des
libertés.
Mais, mesdames et messieurs les députés, qui veut
attenter aux libertés de l’opposition ? Est-ce que c’est cette majorité
qui, pour la première fois depuis le début de la Vème République, a choisi de
donner la présidence de la principale commission du Parlement à
l’opposition ? Je me permets d’appeler l’opposition au calme et à la
raison, et je l’invite à reprendre sa place dans cet hémicycle pour défendre,
comme c’est son droit, ses arguments et ses convictions.
La Ve République a fait de la France une démocratie
moderne, mais nous savons tous que cette démocratie peut encore gagner en
modernité et c’est dans cet esprit que nous avons, ensemble, conduit la
révision constitutionnelle. N’en déplaise à certains, qui se font aujourd’hui
les ardents défenseurs de l’Assemblée nationale, c’est ce Gouvernement et c’est
cette majorité qui sont à l’origine du plus grand rééquilibrage des pouvoirs
entre l’exécutif et le législatif de l’histoire de la Vème République, lorsque
la révision constitutionnelle s’appliquera, parce que les lois organiques dont
vous débattez auront été votées. L’ordre du jour ne sera plus de la seule
décision du Gouvernement, mais sera partagé par le Parlement et par le
Gouvernement. Il y aura désormais un délai minimum pour l’examen d’un texte en
commission, ce qui veut dire qu’il n’y aura plus jamais de textes examinés,
comme ce fut le cas souvent par le passé, et encore même récemment, dans la
précipitation, et c’est le texte amendé par vos commissions qui sera débattu
dans l’Hémicycle de l’Assemblée nationale. Tous les textes de loi, y compris
les amendements que le Gouvernement déposera, seront désormais soumis à des
évaluations préalables.
Le Gouvernement ne pourra plus utiliser le 49-3
qu’une seule fois par session. Le Gouvernement devra, et nous allons le faire
dès la semaine prochaine, demander au Parlement l’autorisation, s’agissant de
l’envoi de troupes à l’extérieur pour des opérations militaires, dans un délai
de quatre mois après le début de ces opérations. Le Gouvernement devra
soumettre à vos commissions parlementaires un certain nombre de nominations à
des hautes fonctions de l’Etat. Et enfin, le Parlement pourra sur sa seule
décision voter des résolutions qui permettront à chacun, dans la majorité comme
dans l’opposition, d’aborder tous les sujets que les parlementaires estiment
nécessaires d’aborder dans l’Hémicycle.
Voilà la réalité de la révision
constitutionnelle ! Voilà la réalité du débat qui se tient depuis
plusieurs jours dans cet Hémicycle !
Alors, mesdames et messieurs les députés nous devons
aller au bout de cette réforme. Et d’ailleurs, ce n’est pas un choix qui nous est
offert, c’est une obligation constitutionnelle. Désormais la Constitution a été
modifiée et nous avons le devoir avant la fin du mois de mars prochain,
d’adopter les textes de loi organique qui permettront à la volonté du
constituant de s’exprimer à travers la réforme du règlement de l’Assemblée
nationale.
Evidemment, mesdames et messieurs les députés, la
contrepartie des pouvoirs beaucoup plus grands donnés au Parlement, la
contrepartie de la fin d’un certain nombre de dispositif, comme le 49-3, dont l’usage
est désormais extrêmement limité, la contrepartie de ces avancées, en faveur du
Parlement, c’est plus de responsabilités et c’est une organisation du travail
parlementaire qui doit être rationalisée.
Comment pourrait-on accepter dans une démocratie que
l’opposition puisse indéfiniment bloquer un débat ? Chacun comprend que
l’opposition veuille défendre ses arguments ; chacun comprend que
l’opposition ait le droit de déposer des amendements et les défendre et
personne ne remet cela en cause ! Mais quelle est la démocratie ?
Quelle est la collectivité locale gérée par l’opposition dans laquelle on
pourrait pendant des semaines et des semaines bloquer le fonctionnement,
simplement en répétant inlassablement les mêmes mots et les mêmes phrases ?
Sur la loi organique en cours d’examen, mesdames et
messieurs les députés, vous avez passé déjà 57 heures ! Sur ces 57 heures,
17 heures ont été consacrées uniquement à des manœuvres de procédure : 43
suspensions de séance, 171 rappels au règlement. Est-ce que ces pratiques sont
véritablement à l’honneur d’une démocratie moderne et tempérée ? Vous avez
examiné 4.000 amendements, dont, évidemment, et c’est son droit, la majorité a
été déposée par l’opposition. Mais est-il acceptable que l’opposition dépose et
défende 22 fois le même amendement, et ceci, série après série de 22
amendements ? L’opposition prétend vouloir protéger le travail législatif
de fond, cette quête est très estimable, je dois dire que c’est aussi la nôtre,
mais cette quête n’a de sens qui si elle est portée avec responsabilité.
Alors monsieur le président, mesdames et messieurs
les députés, j’appelle l’opposition à la mesure. Nous n’allons pas rejouer
indéfiniment la sempiternelle pièce du coup d’Etat permanent. Les Français ont
aujourd’hui d’autres préoccupations. Et je le dis avec beaucoup de résolution.
Nous devons tous ensemble servir la démocratie, nous
ne devons pas la caricaturer. Je dis à l’opposition qu’elle trouvera toujours
le Gouvernement prêt au dialogue pour trouver ensemble les voies d’un meilleur
fonctionnement de nos institutions, par consensus, par l’exercice d’une
responsabilité partagée, comme cela existe dans toutes les grandes démocraties.
Je lui dis que les droits de l’opposition sont par
nature fondamentaux. Nous les respecterons toujours et avec la révision
constitutionnelle, nous les avons même renforcés.
Eh bien mesdames et messieurs les députés, cette loi
organique est bien la traduction d’une réforme constitutionnelle qui va
profondément changer les relations entre l’exécutif et le législatif en
renforçant les pouvoirs des représentants du peuple que vous êtes.
L’Assemblée nationale en sortira renforcée, les voix
de la majorité, comme celles de l’opposition en seront rehaussées. Là est
l’essentiel. Je souhaite que l’Assemblée nationale retrouve donc la sérénité
qui convient à un débat entre citoyen responsable dans le respect mutuel des
convictions et des personnes.
Alors, mesdames et messieurs les députés, nous serons
ainsi fidèles à l’idéal républicain que nous avons tous en partage et dont nous
sommes tous comptables.
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