HISTOIRE

« ROMANESQUE »

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Drôle de titre pour une histoire de la langue française ! Et pourtant, voilà un bouquin qui se déguste comme une véritable aventure. Le livre se veut pédagogique et nous fait découvrir l’origine des mots, mais présentée de telle façon que ça n’est jamais ennuyeux. Ce serait même plutôt passionnant. Enfin, pour peu qu’on aime le « Français ».  Et comme le récit est savamment découpé, on peut savourer chaque tranche une par une, en prenant son temps.

Voilà donc  « la folle aventure de la langue française » !

Elle nous entraîne des Gaulois à aujourd’hui. C’est un roman, et le personnage principal en est justement « le Français ». Lorànt a eu une intuition géniale, celle de raconter notre Histoire en la prenant par « le bout de la langue ». Et tout peut s’y retrouver : si ce qui nous fait Français, c’est le monde dans lequel on vit, c’est aussi ce qu’est  notre langue à travers les mots de notre métissage. Alors, cette  histoire, ce n’est plus le seul amour du passé,  c’est une quête dynamique dont le passé est le passage obligé, parce qu’il  explique notre présent et comment il s’est  forgé. De quoi alimenter un récit  captivant qui nous explique que « oui » vient du latin, et comment on est  passé par « oc » et « oil », le « c’est cela » du « jumeau » de Pierre Richard.

L’enthousiasme du comédien.

Pour écrire un tel ouvrage, il faut  avoir ancré au fond de soi un amour des mots quasi-passionnel. C’est que la langue fait  partie du jeu au théâtre, sinon comment servir les grands auteurs  tels que Molière, Racine ou Feydeau… La langue est un support extraordinaire, c’est elle qui donne la force au comédien quand il sait bien l’employer. Ici, on ne débat pas de la langue, de ce qu’elle doit être. On se contente de la prendre telle qu’elle est, en se jouant de ses inventions, de ses audaces.  Oui, le  troubadour a créé des  mots, et en même temps, le savant a codifié la langue pour qu’elle soit plus facile à transmettre. Car le Français est aussi le fruit d’une conquête.  Il a  surmonté bien des concurrences avant de s’imposer. Vous apprendrez pourquoi on dit la « Saint Glinglin »  et un « remède de bonne femme »… Sans citer Raymond Queneau qui ne se  privait pas avec Zazie à qui il faisait dire « d’où qui  pue donc tant ? » pour « d’où vient cette mauvaise odeur ? », certains n’hésitent pas à « tordre » la langue et Lorànt Deutsch nous montre ainsi que, parce qu’elle est accueillante, les  « argots » nous ont aidés à remplacer le latin. Car c’est par ce chemin-là que la langue est  magnifiée et prend son expressivité, quitte parfois  à faire bondir « l’académie ». Ainsi Fabrice Luchini met en exergue « la tante à Bébert rentrait des commissions »,  c’est « énôôôrme »… pour souligner la force de l’oralité dans l’écrit de Louis-Ferdinand Céline.  Le comédien n’est jamais  loin.

Une langue vivante et de référence.

N’en déplaise aux déclinistes, la diffusion de notre langue est impressionnante et reste encore une référence. Elle a  été longtemps la langue européenne, et l’auteur nous rappelle au passage que Marco Polo écrivait en Français.  Les anglais considéraient la grammaire française plus noble que le latin. Les anglicismes ne doivent pas nous émouvoir, ils ne sont souvent que des mots  français qui nous reviennent déformés. Elle n’est certes plus la première, mais elle n’est pas non  plus devenue une langue morte. Elle est trop  puissante pour disparaître. Qui plus est : elle est un bien précieux car  c’est elle qui soude notre unité nationale. Comme l’affirme Laurànt Deutsch : « Aimer le français,  c’est aimer la France ! », « Parler le français,  c’est déjà s’emparer de cette identité ».  Celui qui parle notre langue connaît souvent mieux que personne notre France. « Romanesque » nous fait découvrir tout ça. Avec  un récit drôle et divertissant, souvent jubilatoire. Rafraîchissant aussi !

Pour les amoureux de la langue, mais pas que !

« Romanesque », la  folle aventure de la langue française  - Lorànt Deutsch  - Chez Michel Lafon.

 


LA VALSE FOLLE DE JUPITER (extrait n°2)

Macron la valse folle de Jupiter 2

 Voici un autre passage du livre de Jean-Marc Daniel, celui consacré au chantier de la retraite.

« …Pour résoudre une fois pour toutes ce délicat  problème, Emmanuel Macron a nommé un « Monsieur Retraite » en la personne de Jean-Paul Delevoye, ancien président du Conseil économique, social et  environnemental.  Les  consultations ont recommencé avec le défilé des partenaires sociaux dans les  couloirs des ministères en charge du dossier. Qu’il faille encore débattre paraît d’autant plus surprenant que depuis le livre blanc remis à Michel Rocard, nous n’avons guère  manqué d’analyses et de recommandations ;  que le constat est simple, à savoir que la France qui consacre 14% de son PIB à payer des retraites, est le pays de l’OCDE, après l’Italie, où  le poids est le plus élevé ; et que la solution elle-même est en fait assez simple. …La retraite repose, comme tout système  de transfert, sur une mécanique dans laquelle on prend pour donner. Si le système  accumule les déficits, c’est que l’on donne trop ou que  l’on ne prend pas assez. Et Alfred Sauvy de préciser qu’en reculant l’âge de départ à la retraite, on aurait moins à prendre et à donner. Cette évidence a d’ailleurs été rappelée en avril 1999 dans un des multiples rapports rédigés depuis le livre blanc de 1991, à savoir celui qui fut remis par le groupe présidé par Jean-Michel Charpin, alors commissaire général au Plan. Ce rapport, qui faisait un point à ce jour guère égalé sur la situation des retraites, contenait cette observation : « Le recul progressif de l’âge de la retraite pourrait favoriser le rééquilibrage des régimes par répartition sans peser ni sur les revenus des retraités ni sur ceux des actifs. Il est justifié à la fois par l’allongement de la vie, le recul de l’âge d’entrée dans la vie active, et l’amélioration de l’état de santé des plus de 60 ans. »

A quel problème peut donc se heurter Jean-Paul Delevoye ? Juste à une assertion assez péremptoire :  « Pour la première fois depuis des décennies, les perspectives financières permettent d’envisager l’avenir avec une sérénité raisonnable, selon le Comité de suivi des retraites. L’enjeu aujourd’hui n’est donc pas de repousser l’âge ou d’augmenter la durée de cotisation. »

Et comme cette assertion émane du programme d’Emmanuel Macron, circulons puisqu’il n’y a rien à voir… ou à revoir.

On peut compter néanmoins sur Trissotin 2.0 (les technocrates ndlr) pour nous délivrer un texte incompréhensible, nourri de références au notionnel, au système à points, à la sauvegarde de la répartition qui aura comme résultat de noyer une nouvelle fois le poisson.

Soyons clair : toutes les astuces de langage plus ou moins alambiquées n’empêcheront pas que sortir de cet inconcevable déni sur l’âge de départ à la retraite est inévitable. Cependant, cela ne prendra tout son sens que si l’on agit selon une démarche économique plus large. Il se trouve que certain personnage envisage de supprimer un jour férié pour financer la dépendance des personnes âgées. Celui qui fait cette proposition  est celui qui  proposait  en 2014 d’assouplir les 35 heures, car il constate que la quantité de travail mobilisée en France est insuffisante. Il s’agit bien évidemment d’Emmanuel Macron. Cela signifie qu’il est indispensable de résorber  le chômage structurel dont le niveau élevé tend à devenir une spécificité française parmi les économies développées, mais qu’il faut également allonger la durée du temps de travail de ceux qui en ont un, en différant leur départ en retraite, en leur permettant de travailler autant qu’ils veulent par la suppression des 35 heures, et en revoyant le nombre de jours fériés :  Emmanuel Macron  le sait et l’a dit... »

Vous avez donc bien compris : d’un côté on ne touche pas à l’âge de départ, dixit Murielle Pénicaud, et de l’autre on veut mettre en place un système qui y pousse avec un concept fumeux « d’âge pivot » …  

Il  y a un  principe qui échappe à Jupiter : ce qui se conçoit bien s’énonce clairement !


ET MOI JE VIS TOUJOURS …

Jean d'ormesson

Pour son dernier roman, Jean d’Ormesson, toujours aussi espiègle, ne pouvait nous faire qu’un pied de nez. En l’écrivant, et en ayant choisi le titre, il ne savait pas qu’il serait publié… après sa mort, survenue aussi subitement qu’un rapt des révolutionnaires sud américains. Pour une œuvre ultime, il fallait un feu d’artifice : nous l’avons ! C’est son ami Jean-Marie Rouart qui le définit le mieux : « Jean d’Ormesson est quelqu’un qui réunit tout le monde. Le passé, le présent et l’avenir.  Il fait partie des meubles de la République. Au-delà de la politique, c’est l’homme du consensus. » Et ça n’est pas pour rien que François Hollande, son ennemi intime, l’a élevé à la dignité de grand-croix de la Légion d’honneur, cette décoration qui « ne se demande pas, ne se refuse pas, ne se commente pas ». Pour celui qui dit n’aimer le mot honneur qu’au singulier, a montré qu’il ne détestait pas les recevoir au pluriel, ces moments particuliers sont ceux où il s’épanouit comme une fleur quand il s’expose en pleine lumière. C’est alors qu’il cligne ses yeux bleu azur et qu’il décoche son inimitable sourire, pour commencer… Comme l’a dit Jean-Luc Mélenchon : « Cet homme est une faille dans l’espace-temps de notre époque morne et cruelle ! » Ce bel hommage d’une personne dont l’académicien ne partageait aucune des idées sinon l’amour de ses adversaires, convient tout-à-fait au dernier ouvrage publié à titre posthume par les soins de sa fille.

Et moi je vis toujours…

Avant de passer au contenu, redisons que Jean d’Ormesson excellait dans l’art de la conversation, qu’on succombait immanquablement à son charme, qu’il avait au plus haut degré la faculté d’empathie. Alors quand il nous prend à témoin pour  se glisser dans l’Histoire des hommes, par le subterfuge inattendu de l’acteur qui prend tour à tour l’identité de personnages qui l’ont faite ou y ont participé, on est d’abord dérouté puis très rapidement conquis. Et il n’y va pas de main morte, c’est un vrai festival qu’il nous livre, un monument dans lequel son érudition n’a d'égale que son immense culture. La lecture n’est pourtant jamais laborieuse, toujours plaisante, à la portée du premier venu. Et on en apprend à toutes les pages. Avec Jean d’O, même le tragique n’est jamais triste. Le voilà qui aborde l’histoire de l’humanité, que dis-je, de la Terre, de l’Univers… avec un entrain d’enfer, sans jeu de mot. Il va nous mener au mur de Plank et à cette question fondamentale : le moment où « il n’y aura plus personne pour se souvenir de rien » .

"Longtemps j’ai erré dans une forêt obscure …"

Tout commence avec un petit garçon qui vit dans un grotte… La longue marche de l’Histoire commence ainsi personnifiée par ce petit garçon contemporain de l’âge du feu, peut-être. « J’ai été africain. J’ai été sumérien. J’ai été égyptien. J’ai été juif. J’ai aussi été troyen… » Un peu plus loin, après avoir énuméré Moïse, Homère, Eschyle, Sophocle, Platon, Aristote qui avaient du génie et Alexandre, Ah Alexandre, c’était autre chose, un demi-dieu, Jean d’O nous donne la clé, : « Tantôt homme, tantôt femme, je suis, vous l’avez déjà deviné, je suis l’espèce humaine et son histoire dans le temps.» Et suivent des fresques qui balaient les siècles avec une profusion de détails. Tout défile comme un film accéléré où la précision des connaissances n’omet aucun détail avec des « arrêts sur image » pour développer ce qui mérite de l’être. L’auteur se fait tour à tour le Juif errant, valet du Titien, serveuse à la Pomme de pin, en train de servir un pichet à quatre amis venus s’enivrer de vin et … de poésie, Messieurs De la Fontaine, Boileau, Molière et Racine. Une manière d’entrer dans un siècle qu’il connaît par cœur, où on le suit avec gourmandise tant il s’y meut avec aisance. Ses multiples personnages, tantôt drôles, tantôt au destin tragique, à l’image de l’Histoire qui mêle la paix et la guerre, l’amour et la haine, les splendeurs et les horreurs, se succèdent comme si « La recherche du temps perdu » était la suite de « l’Odyssée » elle-même emboitant le pas aux « Mille et une nuits »… Toutes les époques sont passées en revue avec la même fougue, le même enthousiasme pour nous en décrire le pire et le meilleur. Les portraits se succèdent, avec un art consommé, en quelques lignes tout est dit.

Blaise Pascal : « A trois ans, il perd sa mère. A six ans, il trace à la craie des figures géométriques sur le parquet. A seize ans, il rédige un Essai pour les coniques où d’après Mersenne, l’ami de Descartes, « il passait sur le ventre de tous ceux qui avaient traité le sujet » . A vingt-cinq ans, il est dissipé et futile. Après un Archimède enfant, il est un Rimbaud mondain. Il meurt à trente-neuf ans ».

Napoléon Bonaparte : «  Achille dans l’Iliade, était le modèle d’Alexandre le Grand. Alexandre le Grand était le modèle de César. Alexandre et César, à leur tour sont les modèles de Napoléon Bonaparte. Il est leur héritier. Peut-être est-il plus digne encore d’admiration que ses prédécesseurs. César descendait d’une illustre famille qui se réclamait de Vénus. Alexandre était fils de roi. Achille était fils d’une déesse. Napoléon Bonaparte sort d’une famille sinon modeste, du moins sans ancêtres ni pouvoir. Il n’est fils de personne. Il est fils de ses œuvres. Le successeur d’Alexandre, de César, de Charlemagne, de Charles Quint, est un enfant de la Révolution. Il l’achève dans les deux sens du mot… »

« Tout passe. Tout fini. Tout disparaît. Et moi qui m’imaginais devoir vivre toujours, qu’est-ce que je deviens ? »

Ultime chapitre avant « un dernier masque. ». Le bouquet final qui met fin à ce véritable feu d’artifice de culture, d’érudition et de talent d’écriture, 280 pages qu’on dévore avec en écho sa voix mélodieuse aux accents chantants ! On devine que cette interrogation ne concerne pas seulement l’Histoire, mais aussi l’auteur qui pressent que la fin n’est plus très loin. La sentait-il venir, en son for intérieur ? Lui seul le sait. Toujours est-il qu’elle est intervenue si peu de temps après que le point final de ce dernier témoignage de son talent ait été mis, qu’on peut s’interroger.  Reste que comme le titre de l’avant dernier chapitre, l’ensemble de son œuvre, comme l’Histoire, restera « une beauté pour toujours ».

Avec Jean d’Ormesson, l’Histoire devient divertissement. Son dernier roman est peut-être la synthèse de son œuvre entière tant on y retrouve la célébration de la vie qui n’ignore jamais le tragique de la condition humaine. Concilier les contraires, indifférence et passion, scepticisme et espérance, désinvolture et sérieux, respect de la tradition et dérision des institutions…   ce faux sceptique, en éternel costume beige sur une chemise bleue comme ses yeux, pieds nus dans ses mocassins vernis, nous accompagne encore une fois de sa silhouette agile d’éternel jeune homme avec la même verve charmeuse !

Jean d’O nous manque déjà. Mais non, c’est un « immortel. « Et moi, je vis toujours ! »

Puisqu’il nous le dit !

« Et moi, je vis toujours. » Roman – Jean d’Ormesson. Gallimard.


« OSONS L’EUROPE… DES NATIONS »

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Le  livre de Christian Saint-Etienne est « the book to read » pour tous ceux qui s’intéressent à l’échéance européenne de 2019 : tout y est ! Une analyse  lucide et clairvoyante par un européen convaincu qui ne pourra pas  être taxé d’européiste !

De l’Europe espérance à l’Europe en panne.

En 200 pages, l’auteur réussit l’exploit d’exposer clairement la construction européenne depuis ses  origines, comment la  machine s’est grippée pour arriver au constat d’aujourd’hui : depuis Maastricht et parce qu’on n’a pas voté la constitution européenne, l’Union européenne est devenue une zone qui s’autodétruit par la concurrence fiscale et sociale.  Il  dissèque les erreurs grossières qui ont été commises, les  bévues des dirigeants sans compter avec le moteur franco-allemand tombé en panne, la France affaiblie par sa dette, ses déficits et son manque de compétitivité,  l’Allemagne occupée à digérer sa réunification. Pour ajouter à la complication, l’Europe a décidé de s’élargir aux ex-pays de l’Est au lieu de s’approfondir. Il aurait fallu de l’harmonisation, elle est rendue impossible par la règle de unanimité. Dès lors, c’est  la règle du chacun pour soi,  les égoïsmes favorisant la désunion.  Il  ne faut pas chercher plus loin l’origine des déséquilibres :   les pays ayant les lois les moins contraignantes ont attiré mécaniquement les  capitaux et les individus les plus doués…  Pour aboutir à une absurdité absolue : la zone euro où des pays partagent une même monnaie sans gouvernement économique ni monétaire. 

L’idée européenne est une idée française.

Il ne faut pas être grand clercs pour voir alors l’écrasante responsabilité de notre pays dans cette situation. Les  politiques économiques menées depuis la fin des années 90 nous ont discrédité aux yeux de nos voisins, nous conduisant à une perte d’influence réelle, encore mesurable aujourd’hui dans la réticence opposée  aux projets de relance d’Emmanuel Macron. Avec le Brexit est apparue une autre faille : avec l’acte unique, il n’aurait pas fallu accepter  les  « dérogations ». L’union n’apportant plus la prospérité  espérée, avec son caractère trop technocratique, elle  récolte le  rejet des peuples.

La croisée des chemins.

Aujourd’hui, l’Europe est  à la croisée des chemins : elle doit choisir entre deux conceptions. La  britannique qui nous conduit au désastre d’un continent de nains chamailleurs incapables d’exister face aux grand Etats, instaurant une compétition, non entre les produits du marché, mais entre les règles du marché. L’autre, celle que devrait imposer le bon sens, resserrée autour des  pays dits « carolingiens » (Christian Saint-Etienne en voit neuf ; France, Allemagne, Autriche, Benelux, Italie, Espagne, Portugal) qui se doteraient de règle fiscales et sociales communes, comprises dans une fourchette raisonnable.  Voilà une confédération qui pourrait se doter d’une politique de puissance susceptible d’exister face aux géants américains et chinois. La subtilité de la proposition de l’auteur tient dans la faisabilité : organisée par un traité intergouvernemental, en dehors du traité de Rome, elle n’abolirait pas l’Europe du libre-échange.  Elle pourrait même s’ouvrir progressivement aux autres pays qui le souhaiteraient sous conditions d’adopter les règles communes. L’Euro de cette nouvelle entité serait enfin garanti.

La fée carolingienne.

Cette solution aussi audacieuse qu’originale, reprenant l’idée d’Europa de Giscard, en la détaillant, de fonder une « fédération économique européenne », dite « Fée » carolingienne, permettrait de renouer avec une politique de puissance  seule capable d’enrayer notre colonisation industrielle et numérique par la Chine et les Etats-Unis.   Mais le temps presse. C’est demain qu’il faut agir.  L’élection de 2019 est une opportunité qu’il faut saisir. A condition de sortir des vœux  pieux et déconnectés de toute réalité consensuelle du discours de la Sorbonne et de nous en donner les  moyens par  une politique enfin sérieuse de réduction des déficits, de notre dette, sans quoi rien ne sera possible. La relance de l’Europe, seule la France peut la  provoquer,  mais l’auteur nous prévient : « la France d’Emmanuel Macron n’a que très partiellement emprunté la voie des réformes nécessaires… Compte tenu de l’accélération de  la nouvelle révolution industrielle, l’Europe sera  politiquement dépassée et stratégiquement morte en 2024 ! »

Ce n’est évidemment qu’une synthèse.  Il faut lire le livre qui offre en plus une dimension didactique qui le met à la portée de tous.

« Osons l’Europe des nations » - Christian Saint-Etienne – Editions de l’observatoire.

 


LA BOUSSOLE D’ORMESSON : GUIDE DES EGARES

Un peu de lecture en attendant la  fumée blanche...

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« D’Ormesson pour tous », ou presque. Son « Guide des égarés » se lit facilement et sa taille ne devrait pas repousser les récalcitrants. La lecture est agréable, aisée et nous procure même du plaisir. Il tente de répondre à une question universelle, que nous nous posons tous, sauf peut-être les fondamentalistes : « Qu’est-ce que je fais là ? ».  Ce manuel de poche, nous  dit-il, « n’a pas d’autre ambition que de décrire avec audace, avec naïveté, avec gaieté ce monde peu vraisemblable où nous avons été jetés malgré nous et de fournir vaille que vaille quelques brèves indications sur les moyens d’en tirer à la fois un peu de plaisir et, s’il se peut, de hauteur. »  

Un monde invraisemblable.

L’auteur nous propose d’essayer de comprendre quelque chose à cette planète « invraisemblable » sur laquelle nous vivons depuis quelques dizaines de milliers d’années. Trente chapitres fractionnent sa pensée pour mieux la déployer et, par-là même, nous transmettre sa vision du monde. Trente chapitres en 110 pages – soit 3 pages et demie par chapitre.  Avec le fil rouge : « Qu’est-ce que je fais là ? ». Alors forcément le premier de ces chapitres fort logiquement se nomme « l’étonnement » ! Evidemment, il est utile de lire la notice préalablement. Tout guide se conçoit  avec un mode d’emploi.

À L’étonnement d’être là, vivant, sur cette planète minuscule, perdue dans l’univers, mais non moins la plus importante à nos yeux, succède une série de chapitres dont l’enchainement est tout simplement  génial. Ainsi, après « La disparition » – où la mort de toutes matières est une règle immuable, même l’univers n’y échappera pas – « L’angoisse » impose La question : « Qu’y a-t-il après la mort ? »

Et Jean d’Ormesson nous délivre ses trois réponses : « La première : il n’y a rien. La deuxième : il y a autre chose – par exemple une infinité d’histoires, d’univers et d’esprits. La troisième : il y a Dieu. » Il n’en envisage pas une autre de plus qui aurait pu être : « le chaos ou le néant ». La déliquescence, nos particules organiques qui se désagrègent en pourriture, alimentant  de nouvelles bactéries… Force est de constater que nous ne savons pas si l’esprit survit à la mort du corps. Une énigme ? Un mystère ? Pour l’écrivain ce serait plutôt une quête intellectuelle. Les nombres « jettent un peu de lumière sur le mystère » assurément.

Dans les chapitres qui suivent, la plume nous entraîne avec une subtile maitrise dans une réflexion alimentée par la science dont les résultats de notre époque dépassent souvent l’imagination et l’auteur forge ainsi une sorte de cosmogonie contemporaine : l’espace, la matière, l’air, l’eau, la lumière, le temps… Les enchaînements sont d’une logique imparable et quasi… biblique.  Ils débouchent logiquement sur l’autre dimension de notre humaine condition : « la pensée »,  depuis qu’avec Descartes « cogito ergo sum ». Et avec elle, ce sont toutes nos misères qui défilent en une série de réflexions qui confinent à la philosophie sans jamais y prétendre. D’Ormesson reste modeste. Le résultat n’en est pas  moins éloquent : le mal, la liberté, la vie, la mort, … sans oublier le plaisir et le  bonheur !

Et on en arrive au chapitre de la « Justice » qui débouche sur le sprint final jusqu’à … Dieu. Sur « la justice », le constat est évident : le monde est injuste.  Le diagnostic se poursuit : « Cette évidence établie, tout le reste – le pouvoir, l’argent, le talent, le caractère, la chance, le hasard, le destin… – coule de source dans une parfaite injustice. ». C’est pourquoi la justice est nécessaire – du reste, bien des efforts ont été déployés pour qu’elle puisse s’exercer. Mais voilà, pour Jean d’Ormesson, aucun de ses efforts n’a suffi à l’assurer, allant jusqu’à les comparer à Sisyphe poussant éternellement son rocher. Faute de pouvoir satisfaire vraiment à cette exigence, il nous entraîne sur les chemins qui compensent son absence : La beautéLa véritéL’amour… Dieu.  Un cheminement  imparable qui n’est  pas pour autant un hymne à la religion catholique, apostolique et romaine. Le mur de Planck n’empêche pas d’arriver à Jésus, l’incarnation de dieu sur la terre. C’’est une manière de compenser le sort injuste par ce qui ne reste qu’une spéculation : « Dieu existe-t-il ? Le débat ne sera jamais tranché, et il ne sera jamais clos. ( …) Tout choix, dans un sens ou dans l’autre, comporte une part d’arbitraire. »

Mais il reste celle qui peut donner malgré tout du sens : l’espérance !

 


UN AUTRE REGARD … SUR DE GAULLE

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Voilà un livre  qui arrive à point nommé.

Au moment où la prochaine élection présidentielle se profile, alors qu’elle commence à hanter tous les esprits et que les prétendants affluent au portillon, le regard que nous livre Yves De Gaulle sur son grand-père peut rappeler à tous ce qu’est vraiment le « service de la France ». Une lecture dont chaque candidat, de droite ou de gauche, devrait faire son miel ou prendre de la graine, puisque tous ou presque se réclament désormais du Général et vont même jusqu’à faire le pèlerinage de Colombey.

Je dédie cet article à mon ami Marcel, trop vite parti, trop tôt parti. Lui qui était un fervent gaulliste, il se serait délecté à lire cette remarquable analyse sur la personnalité du Général De Gaulle.

Yves De  Gaulle aura attendu presque cinquante ans après la disparition de son grand-père  avant de prendre la plume pour nous livrer ce puissant exercice de décryptage de la personnalité d’un homme qu’on savait hors du commun, ce qui transparaît  constamment au fil des pages. S’il n’a pas l’ambition de faire œuvre de mémorialiste, s’il n’encombre  pas le contenu de ces multiples anecdotes qui auraient réduit le personnage à notre humaine condition, le souvenir qu’il garde de ses vacances à la Boisserie et la proximité qu’il avait avec son grand-père permettent un éclairage pertinent et plein de sensibilité.

Le contenu s’appuie sur une analyse solide de son personnage et de son univers : inventaire de la bibliothèque de la Boisserie, relecture des ouvrages publiés, revisite des lieux qui l’inspirèrent, avec au cœur le parcours immuable du tour de la propriété, moment privilégié d’échange entre grand-père et petit-fils. Cette sorte de radiographie, à la fois pudique et documentée, va nous permettre de mieux comprendre l’action et la pensée de l’homme, dont il ne sépare jamais la « statue » de celui qui l’habitait. C’est donc un personnage en chair et en os qu’il nous décrit. Il l’a suffisamment connu, il l’a aussi aimé et admiré et surtout il a eu maintes fois l’occasion de lui parler très directement jusqu’à un âge suffisant pour qu’il puisse en avoir une idée adulte. Il avait  19 ans quand son grand-père est parti. Yves avait pleinement conscience de la dimension personnelle exceptionnelle du personnage qu’il côtoyait et le mérite de ce livre est de nous la faire découvrir comme personne d’autre n’aurait pu le faire.

Ce livre arrive à point nommé pour rappeler, à une époque où tout le monde se veut plus ou moins gaulliste, qu’il n’en a pas toujours été ainsi. Personnellement, je me souviens bien du regard sombre que me jetaient mes camarades de promotion à l’Ecole Normale à me voir lire les « Mémoires de guerre » alors qu’eux vaquaient avec Sartre sous le bras. Il fallait du courage et c’était en même temps un pied de nez que je leur faisais. L’opposition d’alors n’avait pas de mots assez durs pour stigmatiser le « pouvoir personnel » et combattre le régime dans lequel elle s’est coulée pourtant avec délice le moment venu. Il est donc important de remettre en perspective la vie et l’action d’un homme d’état auquel aucun homme politique d’aujourd’hui ne peut se comparer, sauf à lui arriver à la cheville.

Le rebelle et la rupture.

De Gaulle aura paru à beaucoup un traditionaliste,  ce qu’il était assurément, guidé par l’idée de nation toute sa vie durant. S’il avait « une certaine idée de  la France », celle-ci n’était pas stérile, fermée, passéiste. Non, la France était pour lui une personne vivante dépositaire d’un héritage précieux : son histoire millénaire qu’il fallait à tout prix préserver. Une leçon perdue de vue par ceux qui nous gouvernent aujourd’hui, comme quoi aller se recueillir sur une tombe ne suffit pas. Yves De Gaulle nous fait saisir combien son côté « rebelle » est structurant de son parcours et le conduit jusqu’à la « rupture » assumée quand elle lui parait nécessaire.  Ces notions sont capitales  pour comprendre l’homme du 18 juin 1940. Face à l’inacceptable, aucun compromis n’était possible et dans la pire défaite que la France ait connue et qui aurait pu la faire disparaître, son réflexe immédiat fut de sauvegarder à tout prix son capital moral et historique. Dès lors il lui revenait d’incarner la France.  Et il en a été ainsi chaque fois que ce capital était menacé, que ce fût par l’allié anglais ou encore américain.  Rebelle, il fallait qu’il le soit face aux puissants s’il voulait exister : « c’est quand on est faible qu’on ne fait pas de concessions ! »

Mais le « géant »  était aussi un être sensible et l’on découvre à quel  point il était ouvert d’esprit, disponible pour s’expliquer ou répondre aux questions, combien il doutait de lui-même et s’interrogeait sur ses choix. Il avait une certaine idée de l’homme et s’il était libéral et républicain, il était partisan d’une répartition équitable de la richesse, à l’écart du capitalisme anglo-saxon ou du communisme soviétique. Sa réflexion l’avait porté vers une « association du capital et du travail » par la « participation ». Il était aussi européen, et il avait compris la vitale nécessité de la construction de l'Europe, comme celle de la réconciliation franco-allemande.

C’est esprit méthodique de « rebelle » et de « contestataire » le conduisait aussi à la prospective géopolitique. Combien de voyages émaillés de discours provocateurs, du « mano en la mano » mexicain au « Vive le Québec libre » sans oublier le discours de Phnom-Phen… ont provoqué des petits séismes dans le microcosme politique mondial tant il voyait haut et loin. Le Général se donnait toujours le temps de la réflexion et de la méditation. La lecture des anciens lui était d’une grande utilité comme son immense culture.

Le livre fourmille d’anecdotes, de citations, de réflexions parfois inattendues. On y découvre ce qui hante le petit-fils et qui est l’objet de sa quête : la méthode que Charles De Gaulle utilisait pour prendre ses décisions.

Pour les gaullistes, ceux qui le sont moins ou qui le seront un jour, pour les candidats à la présidentielle (indispensable pour la probité et la transcendance), pour les politiciens en mal de modèle (ça ne peut pas faire de mal)… voilà un ouvrage qui ne peut être qu’utile. Et puis aussi tous les curieux que le personnage intéresse parce que non seulement il est entré dans l’Histoire, mais il l’a faite !

« Un autre regard sur mon grand-père Charles De Gaulle » - Yves De Gaulle – Plon.

 

 


UN PEU D’HISTOIRE, POUR CHANGER …

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LES COLONNES INFERNALES DE TURREAU

Mes lectures d’été vont vous paraître bien studieuses. Deux raisons m’ont amené à lire ce livre. D’abord, le prof d’histoire qui reste éveillé et qu’un ouvrage sur le drame vendéen ne pouvait qu’intéresser, ensuite il se trouve qu’il a été écrit par une excellente amie, Anne Rolland, dont j’admire la vivacité intellectuelle. En prime, il m’intéressait de savoir ce qu’il en avait été exactement de cet épisode de l’histoire de la Révolution française, notamment au moment de la Terreur, moi qui ai toujours eu le sentiment d’enseigner une version un peu trop officielle de la répression républicaine en Vendée. Evidemment, ce livre est un peu « documenté » et s’adresse aux férus d’histoire, bien qu’il soit parfaitement accessible et très bien écrit. Mais c’est avant tout un état des lieux sur les recherches d’une historienne rigoureuse.

La question principale que je me posais et à laquelle j’étais incapable de répondre était : « Y a-t-il vraiment eu une tentative de génocide de la population vendéenne ? »

C’est aussi l’une des préoccupations de l’auteure. Mais c’est aussi une vendéenne dans l’âme. Ses recherches vont-elles être partiales ? La réserve tombe tout de suite : nous sommes en face d’un travail parfaitement honnête et sans parti-pris, entièrement fondé sur des documents eux-mêmes indiscutables. La rigueur fait partie de la méthode, on n’y déroge pas pour se faire plaisir. L’intérêt de cet ouvrage réside aussi dans le tableau très fouillé qu’il dresse d’une époque, de ses acteurs locaux ou nationaux, des conditions matérielles, de la réalité d’un pouvoir politique encore instable… et qui permet de mieux comprendre ou d’approcher ce qui s’est réellement passé.

Anne Rolland passe en revue les multiples aspects de cette guerre civile, car c’en est une : qui sont les soldats de la Terreur, avec leur mentalité, leurs représentations mentales, leurs peurs, leurs difficultés, leurs conditions de vie souvent épouvantables ; pourquoi les « colonnes » imaginées par Turreau, qui vont conduire à un paroxysme de violence, n’ont jamais réellement rempli leur objectif ; combien y a-t-il eu exactement de « colonnes » et quels contingents elles ont mobilisé ; comment on compte les morts (ou pas) et on rend des comptes avec les exagérations et les approximations d’officiers au gré des besoins politiques ou militaires de leur commandement.

Elle analyse avec minutie le système des colonnes à travers les stratégies militaires et le « plan Turreau » pour observer son application dans la réalité, la réalité de l’armée républicaine, souvent sans uniforme, mal armée, aux effectifs souvent fantaisistes. Le « théâtre vendéen » lui-même présente un décor de « mauvais chemins », un labyrinthe où se perdent les troupes, propice à la guerrilla, bref une sale guerre qui génère tout un cortège de tueries, de massacres de part et d’autre.

Elle nous présente aussi les hommes, ces généraux de l’armée de l’Ouest, l’aventure que celle-ci peut représenter pour eux, entre goût de la guerre et choix politiques, les querelles qui les divisent, les rapports d’autorité entre eux et avec le pouvoir central, la place qu’occupe Turreau qui a laissé son nom aux « colonnes » pour l’Histoire. Ils commandent une armée de « nu-pieds », mal nourrie, manquant en permanence de munitions, confrontée à de redoutables difficultés de logistique. On découvre que la guerre qui est menée est encore une guerre archaïque, avec une armée manquant de pain et obligée de vivre sur le « terrain » à l’ancienne en se livrant au pillage, et dont l’image de bravoure et de discipline qu’on veut en donner est souvent à cent lieues de ce qui se passe. Elle est confrontée à une « armée vendéenne » divisée par les rivalités de ses chefs, instable en nombre, qui opère par coups de mains, et qui n’arrive pas à prendre le dessus non plus.

Au final, il n’y a pas eu de « génocide », au sens d’une volonté affirmée d’exterminer une population par des moyens concordants et constants. Par contre, il y a bien eu des massacres et des tueries, des villages brûlés, et des accès de violence inouïe. C’est le type même de la « sale guerre ». Comme conclut Anne Rolland, « la Vendée militaire au temps des colonnes permet une histoire en creux de l’Etat révolutionnaire sous la Terreur, confronté à une insurrection populaire dont le sens et la maîtrise lui échappent durant de longs mois ». Les colonnes apparaissent comme « un système de guerre dans l’impasse, f    aute d’un Etat fort, d’une stratégie claire et d’une politique cohérente à Paris comme en province. » Et Turreau apparait pour ce qu’il est : plus qu’un militaire, avant tout un politique et d’ailleurs il sera peu souvent sur le terrain. Ce qui fait la particularité du conflit vendéen tient dans la part importante de l’idéologie et la diabolisation de l’ennemi qui conduit à l’extrême violence contre les populations civiles où soldats et non-combattants ne sont plus distingués. La « Vendée militaire » est bien une guerre civile. Elle n’a pas fait les 300 000 morts généralement avancés par les Vendéens mais plus probablement 150 000 victimes. Et c’est encore beaucoup.

Au demeurant, un livre technique mais qui sait rester passionnant. Les nombreux angles d’analyse en font tout l’intérêt par les recoupements qu’ils permettent, le tout à partir des documents d’archives existants.

Avis aux amateurs d’histoire avec un « H ».

Anne Rolland-Boulestreau – Les colonnes infernales (Violence et guerre civile en Vendée militaire, 1794-1795) – Fayard Histoire.

Anne Rolland est maitre de conférence à l’Université catholique de l’Ouest.


DES CHEMINS UN PEU TROP GALVAUDES

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J’ai beaucoup de respect et d’estime pour Alain Juppé. C’est donc avec beaucoup d’intérêt que je me suis penché sur son livre « Mes chemins pour l’école », avec l’espoir d’y trouver la « pierre philosophale » qui permettrait de remettre sur les rails un système éducatif en pleine déroute.

Un état des lieux honnête.

L’état des lieux qu’il fait est souvent lucide, mettant souvent le doigt sur les problèmes qui rendent inefficaces les apprentissages. Je partage globalement le diagnostic qu’il fait sur le fonctionnement de l’école : il est assez juste. Il est énoncé avec un ton serein qui n’appelle pas à la guerre, en s’appuyant sur des constats incontestables. Je dois cependant reconnaitre que j’ai dû m’accrocher pour lire ce livre jusqu’au bout. Et je ne crois pas que ce soit à cause d’un préjugé qui viendrait de mon expérience personnelle. Le choix de rendre compte de nombreux témoignages rend le parcours fastidieux et amène à des redites. Souci d’honnêteté certainement de la part de l’auteur, qu’on reconnait bien là, mais si la pédagogie est l’art de la répétition, ici elle n’emporte pas l’adhésion. Mais au fond, peu importe la forme, ce qui compte ce sont les projets. Là encore, je suis resté sur ma faim.  A force de vouloir « rassembler, apaiser » finalement on ne « réforme » guère.

Des propositions rarement innovantes.

Certes, les propositions sont pertinentes, la plupart relèvent du bon sens et de ce fait sont trop convenues, quand elles ne sont pas académiques. Ces chemins reposent sur un vécu que j’ai connu moi-même, celui d’une école de la République qui a permis d’emprunter l’ascenseur social à de nombreuses générations de Français, et Alain Juppé en parle avec une sincérité et une émotion touchantes. Cette vision idyllique est celle d’une école qui a disparu comme s’est évanouie la « construction démocratique des élites » qui faisait sa gloire.   Cela ne retire rien à la bonne foi et à l’honnêteté du propos. Tout le monde s’accorde aujourd’hui sur l’idée qu’il faut donner de l’autonomie aux établissements, sur la nécessaire déconcentration –à défaut de décentralisation- de la gestion des personnels enseignants, sur l’urgence d’une revalorisation financière du métier.  On adhère à la vision du maire de Bordeaux sur l’irruption de l’informatique et la nécessaire adaptation des pédagogies à ces nouveaux outils.  Un bon point aussi quand il tranche en faveur de la méthode syllabique pour apprendre à lire… Je suis moins convaincu quand il propose des évaluations qui supposent toujours des démarches lourdes et technocratiques, alors qu’un simple cahier des charges un peu précis permettrait à chaque maitre de mesurer les performances de ses élèves sans avoir recours à ces « grands-messes » uniformes. De même le « conseil d’établissement » et « l’agence d’évaluation » me paraissent directement sortis de l’univers technocratique : en a-t-on vraiment besoin ? Des machins qui viendront s’ajouter à une machine déjà très dévoreuse en parlottes de toutes sortes, en « conseils » en tous genres, en dispositifs variés … Enfin je déplore le refus de recourir à l’arme de la sélection par l’examen. Exemple : l’entrée en 6ème. Si on veut sauver le collège, commençons par n’en permettre l’accès qu’à ceux qui pourront en suivre les cours. Quelle autre procédure, meilleure que l’examen –pas le concours-, peut établir sans arbitraire le tri nécessaire ?

Le « dark side of the wall ».

Surtout, et c’est un reproche que je me permets parce que je veux être utile à la réflexion qu’Alain Juppé poursuit. Il sous-estime, à mon avis gravement, le « dark side of the wall » (excusez l’emprunt aux Pink Floyd).  Notre éducation nationale est aujourd’hui dans un état de délabrement que l’ensemble des témoignages qu’il a recueillis effleure mais ne mesure pas correctement.  Nous avons une légion d’enseignants dont beaucoup ont été recrutés à un niveau insuffisant voire médiocre, très souvent ignorants de la langue française correcte, encore plus de ses subtilités. Nous avons affaire à une citadelle  où la part de l’idéologie agite encore une fraction non négligeable du personnel, formé par Lutte Ouvrière à travers le réseau de feu les IUFM. On en a mesuré la capacité de nuisance avec les « réfractaires » qui refusaient les heures de soutien individualisé. Et puis il y a le repaire, le bastion de la pensée bobo-psycho-soixante-huitarde qui inspire le contenu des réformes et son langage verbeux digne des précieuses ridicules : j’ai nommé l’Institut Pédagogique National. Il faudrait le supprimer. Comme il faudrait revoir le pouvoir de la caste des Inspecteurs Généraux… Le chemin que propose Alain Juppé parcourt un monde de bisounours, alors que la réalité est faite de barrières, d’obstacles, de résistances. Un monde avec lequel le « consensus » est impossible. Je me rappelle, cette réflexion que m’avait faite une collègue avec laquelle je croyais bien m’entendre alors que nous nous concertions sur une « charte de l’élève citoyen » pour notre établissement : à ma proposition de l’appuyer sur les valeurs qui font « consensus » elle me répliqua qu’avec moi il n’était pas possible, que nous ne partagions pas les mêmes valeurs. Evidemment, tout le monde savait que j’étais de « droite » ! Edifiant non ? Une autre impasse est faite sur les établissements des « territoires perdus de la  République » où tenter d’enseigner est un enfer. Il ne sert à rien de nier leur existence, mais les oublier est encore pire. Il aurait fallu en faire des « citadelles », ils sont devenus des zones de non-droit au savoir. Régler ce problème demandera beaucoup de fermeté car le discours d’apaisement n’a aucune chance d’y être compris encore moins entendu.

Education et enseignement ne se confondent pas.

Il est bon de le rappeler. Comme Luc Ferry, je pense qu’éducation et enseignement ne se confondent pas. L’éducation relève des parents et s’incarne dans la sphère privée, l’enseignement est d’abord l’affaire des profs et se dispense dans la sphère publique des établissements scolaires. Sans enfants correctement élevés, il n’est pas possible d’enseigner, même si les enseignants sont amenés de temps en temps à rappeler les règles élémentaires de la civilité. Mais voilà, les parents sont de plus en plus aux abonnés absents ou manquent d’autorité, ou encore inculque une éducation dont les valeurs sont incompatibles avec celles de notre société. Il ne sera pas possible de relever le défi d’un système éducatif performant si les familles continuent de faire défaut. Il ne servira à rien de réformer. Tant qu’on ne mettra pas l’éducation avant l’enseignement. On n’est pas obligé d’ajouter à ce drame des mauvaises réformes comme celle qui vient d’être décidée pour le collège –la pire jamais vue- qui va casser le peu qui reste à bien marcher dans le système.

En conclusion, je donnerai le mot de la fin à Alain Juppé : toute réforme à venir devra commencer par l’école primaire, voire maternelle, c’est-à-dire par l’acquisition des fondamentaux qui commandent toute la suite des études.

 


POUR RESTER BRANCHE MAIS COOL EN AOUT

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Difficile de déconnecter avec cette actualité qui n’en finit pas de nous abasourdir : une fille tabassée parce qu’en bikini, un roi qui privatise une plage, des chiffres du chômage bidouillés, la bourse qui fait du yoyo, un copain casé à ERDF avec une paie de roi du pétrole, … que le monde serait triste si nous n’avions pas un président audacieux. Mais en cette veille du mois d’août qui s’annonce  à quelques encablures, le hit de l’actu c’est … Grey et la pire atrocité c’est… le passage des guignols en crypté !

Au moins, dans ce fatras a-t-on une bonne nouvelle : demain est le jour de la libération. C’est en effet à partir du 29 juillet cette année que les Français commencent à travailler pour eux et ont fini de remplir le tonneau des Danaïdes de l’Etat ventripotent : 57,5% de prélèvements.  Le record d’Europe.

Alors à quoi allons-nous passer le temps d’août ?

Voici quelques lectures que je vous conseille :

 

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ON VA DANS LE MUR, d’Agnès Verdier Molinié.

La militante de la baisse des dépenses fait l’autopsie de l’Etat et de ses satellites, et recense tout ce qui est dépensé souvent en pure perte, gaspillé, mal utilisé. A la tête de la fondation IFRAP, vous l’avez souvent vue à « C dans l’air » défendreune stratégie vigoureuse de réduction de nos dépenses publiques. Son livre est un recueil explosif : elle nous fait pénétrer au cœur d’un labyrinthe administratif que n’aurait pas désavoué Kafka et où le plus brillant de nos hauts fonctionnaires se perdrait. On y découvre une accumulation de taxes, de primes, de statuts particuliers, souvent bien cachés. Elle y trouve des règles, des normes ineptes, des doublons à foison qui s’empilent comme les crèpes le jour de mardi gras. Des économies : on peut en faire partout et de colossales, c’est plus de cent milliards par an qu’on pourrait éviter de prélever… Mais il faut réformer. Là aussi elle a des propositions qui décoiffent mais les Français sont-ils prêts. On va dans le mur et il faut agir d’urgence !

 

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UNE CRISE DEVENUE FRANCAISE, d’Eric Woerth.

Eric Woerth est un clinicien de l’économie. Il n’a pas son pareil pour vous décortiquer une situation, l’analyser méthodiquement et vous exposer pédagogiquement les ressorts et les freins qui y ont conduit. Vous voulez des réponses à quelques-unes des questions qui nous hantent comme par exemple : « pourquoi la France est-elle le seul pays où le chômage de masse n’a pratiquement pas cessé depuis trente ans ? » ou encore : « comment en est-on arrivé à une fiscalité qui est devenue une punition et a dépassé le seuil de tolérance ? »… En quelques 180 pages Eric Woerth vous donne les réponses, honnêtement, sereinement, sans chercher la défausse où l’exagération militante qui affaiblit une démonstration. Et puis en une soixantaine de pages, il tente de nous redonner espoir : la France a sa place dans la mondialisation si elle le souhaite, nous pouvons croire à nouveau dans l’avenir à condition de retrouver la confiance… Vaste programme. Justement son livre pourrait en être un, ou en constituer un excellent support à tout le moins. Avec lui l’Etat-providence auquel nous autres Français sommes très attachés ne meurt pas, il est repensé, reconfiguré. Le chemin indispensable pour obtenir une adhésion populaire.

Les deux livres sont complémentaires. Avec eux on gagne en lucidité.

 

Pour la partie détente, deux revues d’excellent niveau et très passionnantes :

Blake et Mortimer001BLAKE ET MORTIMER face aux grands mystères de l’Humanité, Beaux-Arts hors série.

Pour les amateurs de cette BD très particulière, on trouve là un filon d’informations et de nombreux détails sur les particularités de l’univers Jacobsien. C’est fouillé, avec de nombreuses illustrations et la participation de spécialistes de haut niveau. On n’échappe pas, de ce fait, à quelques redites, mais c’est pardonnable vu la qualité de l’ouvrage. Vivement recommandé aux fans des deux anglais. Cette revue est un vrai délice « Old Chap’ » !

 

Pagnom001PAGNOL, Le Figaro hors série.

Voilà une revue magnifique tant par sa présentation que par la qualité de ses illustrations. On replonge avec ferveur dans la Provence intérieure de la belle époque, dessins savoureux de Dubout à l’appui. On y fréquente le bon Fernandel, le Grand Raimu, les égéries successives de l’académicien…. Le tout illustré de magnifiques photos. Les articles sont copieux et attrayants. De quoi passer un bon moment sur le transat ou à la plage !


Passez de bonnes vacances et rendez-vous pour la prochaine "Chronique des jours qui passent" !

 


ENFIN, UNE BONNE NOUVELLE : FINKIE CHEZ LES SAGES !

Alain Finkielkraut

Alain Finkielkraut a été élu membre de l’Académie française dès le premier tour. Une récompense méritée pour l’auteur de « la défaite de la pensée ». Son succès est un pied de nez à tous ceux qui ont alimenté la cabale de pseudos intellectuels, ces donneurs de leçon de la gauche morale qui, après l’avoir agoni d’injures pendant plusieurs années, ont tenté de lui interdire l’accès à l’immortalité. Ils voulaient en faire une victime expiatoire pour ses prises de positions relatives à l’éducation et à l’identité française qui lui ont valu le qualificatif de réactionnaire et, parfois, de néo-fasciste. Des attaques auxquelles la majorité des sages n’ont pas attaché d’intérêt préférant sûrement se référer à son talent et à son intelligence.

C’est un intellectuel fébrile et souvent impatient qui arrive sous la coupole. Tout le monde l’a vu un jour à la télévision, dans des débats, utilisant parfois des termes philosophiques que d’aucun aura eu du mal à comprendre. Il est l’auteur de nombreux ouvrages dont « la Défaite de la pensée » et « l’Identité malheureuse » dans lesquels il pose un regard consterné et inquiet sur les dérives de la modernité et l’échec de l’intégration. S’il fait preuve de pessimisme c’est parce qu’il ne voit pas d’horizon dans les dérives qu’il observe : Il dénonce notamment les failles d’un enseignement qui s’est dégradé à la fois parce que les pouvoirs publics ont transformé en lauréats des élèves ou étudiants qui ne le méritaient pas, et parce que, loin d’avoir assimilé les générations issues de l’immigration, nous les laissons trop souvent adopter des idées et des comportements qui trahissent Jules Ferry et la République.

Pour ses détracteurs, c’est un « réactionnaire » qui, venu de la gauche, serait tombé dans la droite extrême. Comme Alain Finkielkraut se déclare sioniste et qu’il est juif de surcroît, ce qui fait beaucoup de défauts aux yeux d’une société moins tolérante qu’on le croit, il est devenu l’épouvantail idéal de la gauche bien-pensante, qui ne regarde que son nombril comme centre du monde intellectuel.

Doit-on reprocher à cet intellectuel de haut vol, amoureux de la langue et des textes, d’exprimer l’effroi que lui inspirent l’évolution inquiétante du langage, l’inversion des valeurs qui décrit le mieux la crise nationale, et le danger d’une modernité fourre-tout qui fait de nos jeunes des communicants très rapides mais incapables de s’exprimer correctement. On en vient à lui pardonner d’avoir osé vivre jusqu’à peu de temps encore sans même une carte bancaire et de ne connaître rien à Internet. Sans doute ses adversaires se servent-ils de ces refus de modernité pour dénoncer son inadéquation à la société contemporaine.

Sans doute est-ce pour cela qu’il lui arrive de perdre le sens de l’humour et de manifester dans les débats un agacement et une intransigeance qui laisse peu de place au débat. Il n’en reste pas moins que l’ensemble de ses qualités, la puissance de son savoir, sa personnalité rayonnante ont leur place à l’Académie française où il pourra défendre encore plus la République et la langue française, avec l’exigence qu’on lui connait.

La cabale a échoué. Elle était tellement basse que même Jean d’Ormesson s’en est ému au point d’annoncer, avec d’autres immortels, qu’ils démissionneraient si Alain Finkielkraut n’était pas élu. La tentative de « mise à l’index » par cette gauche intolérante et imbue d’elle-même n’a pas fonctionné : le « réac » triomphe !  Et c’est tant mieux.

 


LECTURES D'ETE

 

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MOI, PRESIDENT …

André BERKOFF

 

Après « La chasse au Sarko », qui était plutôt un plaidoyer en faveur du précédent président qui ne méritait pas selon l’auteur, la campagne violente qui était menée contre lui sans relâche, André Bercoff nous livre une suite inattendue. Avec le style corrosif qui lui appartient, il nous présente un réquisitoire implacable de la politique menée par François Hollande depuis son arrivée à l’Elysée.

« Moi, Président… » reprend l’anaphore du célèbre face à face, presque point par point, pour mieux retourner chaque énoncé contre celui qui l’avait prononcé avec morgue devant son adversaire. Cet ami de Jacques Attali n’y va pas par quatre chemins : il souligne combien le locataire de l’Elysée n’a pas estimé à leur juste mesure les énormes défis qui l’attendaient.

Qu’est devenu le « président normal » obligé de faire aujourd’hui du « sous-Sarkozy » ? N’ayant pas pris le taureau du déficit  par les cornes dès le début, il est aujourd’hui désemparé. C’est que « tout simplement… l’accélération de l’histoire a annulé tout répit ». S’étant trompé de postulat de départ, il a cru, par opposition à son prédécesseur, que la priorité était l’exemplarité de son comportement, alors que les Français attendaient bien davantage de lui : qu’il s’occupe du pays. Faute de l’avoir compris, l’homme n’est pas parvenu à imposer une quelconque normalité, car la fonction ne le permet guère, et passe plus pour un gribouille mou que pour un réformateur zélé. Comme le souligne Bercoff : « bien malin serait celui qui pourrait arriver à formuler, non ses objectifs -communs à tout le monde- mais sa manière de les atteindre. »

Cet ouvrage découpe au scalpel les douze premiers mois de présidence, dans un examen sans concession. Le résultat ne se fait pas attendre : pour retrouver la santé, le président a quatre ans pour affronter « la vérité mano a mano, en public. Hors étiquette et hors catégorie ». Il est encore temps puisque la gauche de la gauche agonise et que l’UMP…

Voilà une lecture qui vous procurera du plaisir si vous aimez le style incisif, les constats posés clairement, les renoncements étalés sous les projecteurs, l’ironie et l’humour … vache. Jamais méchant, mais parfois virulent. Du Bercoff, brut de décoffrage, coulé en béton vibré !

… « Mais Hollande qui s’est posé habilement comme candidat « normal » a montré dans ses douze premiers mois d’exercice du pouvoir, qu’il a, en dépit de toutes ses déclarations apaisantes, endossé les habits de l’hyperprésident, parce que les Français ont élu un capitaine, un chef, et non une tribu. De plus quelle « normalité » peut-on évoquer quand notre héros peut se targuer d’être le premier président non marié de l’histoire de la Vème République ? »…

… « Il est minuit, docteur Hollande. Vous vouliez apaiser la France : elle n’a jamais été aussi divisée. Vous vouliez la changer : pour le moment, cela reste un mirage. »…

Moi, Président… André Bercoff. Editions First. 2013

 


LECTURES D’ETE

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Comment se détendre tout en restant branché ? La lecture peut être un excellent moyen. Voilà un livre que vous pourrez déguster à votre convenance installé dans un transat ou installé placidement sur votre serviette de plage à deux pas de l’estran.

SAUVE QUI PEUT !  « Arrêtez le tir aux pigeons »

De Eric BRUNET

Pour le polémiste, la France, c’est le Titanic. Et si vous ne voulez pas couler avec lui, puisque nos gouvernants paraissent incapables de le sauver, sauter dans une chaloupe avant qu’il touche l’iceberg qui lui sera fatal. Autrement dit, une seule solution : la fuite !

Il considère que la France est si sclérosée que l’émigration de ses jeunes entreprenants ne doit pas être vécue comme un drame, mais comme une chance. Notre seule chance de salut .

Le raisonnement d’Eric Brunet repose sur une analyse convaincante du déclin de notre pays. Vous voulez en connaitre les causes ? Il aligne les vérités que nous connaissons : la pression fiscale, la pathologie de l’égalité, le mépris de celui qui entreprend, auquel il faut ajouter le rêve de sécurité incarné par le statut de la fonction publique. Une toile de fond : une parodie de guerre civile permanente.

Alors, oui, la fuite est une solution. Une partie des exilés volontaires reviendra à terme au pays, nourris d’expériences étrangères. Eux seuls sauront sortir de l’ornière notre vieille nation.

Hollande, c’est le Harold Wilson, ce premier ministre travailliste, responsable de l’étatisation de la Grande-Bretagne qui en fit « l’homme malade » de l’Europe.

L’auteur qui ne voit point venir le « Thatcher » français cite un jeune expatrié à Londres : « Nous allons revenir, forts de notre expérience d’un monde ouvert et libre. Nous aimons trop la France pour la laisser entre vos mains ! ».

Eric Brunet nous prend à témoin : « Dans une Europe où l’on professe la libre circulation des biens et des personnes, faut-il continuer à conspuer ceux qui, chômeurs, artistes, entrepreneurs, ingénieurs, jeunes diplômés, chercheurs, ouvriers, business angels, vont chercher ailleurs une chance de réussite ? Non, bien sûr ! » 

Et si la prophétie du retour ne se réalise pas, c’est que l’autre scénario, moins avantageux pour nous, ce sera produit. Celui qui verrait nos concitoyens les plus énergiques se détourner de notre pays. Dans le passé, la France a connu de tels mouvements, tels les protestants si industrieux fuyant les dragonnades de Louis XIV, pour le plus grand bénéfice de l’économie hollandaise ou allemande. Un exemple plus proche de nous, cité par Eric Brunet : ce proche de Turgot, désabusé par le tour sanglant pris par la Révolution française qui alla s’installer aux Etats-Unis où il créa une petite entreprise appelée à grandir, grandir…. Il s’appelait Du Pont de Nemours ! Le malheur c’est qu’il n’est jamais revenu.

Mon passage préféré : « La fainéantise, c’est plus que notre fonds de commerce, c’est un tropisme national, des « rois fainéants » au VIIème siècle jusqu’aux 35 heures de Martine Aubry en 2000. Quand on goûte l’euphémisme, on appelle ça l’art de vivre à la Française. »  et suivent une vingtaine de pages argumentées et illustrées. Un régal !

 Tous les sujets qui fâchent sont abordés, c’est ce qui fait le charme et l’intérêt de ce livre, qui se veut évidemment polémique. C’est du pur Brunet !

Sauve qui Peut, Eric Brunet, Albin Michel

 

 


FRANCE : ETAT D’URGENCE

Une stratégie pour demain, de Christian Saint-Etienne.

France Etat d'Urgence001   Christian saint etienne


« Nous avons mené une incroyable expérience scientifique pendant plus de deux décennies, utilisant la France comme rat de laboratoire, pour démontrer que la dérive de la dépense publique casse la croissance et augmente le chômage. Le succès de l’expérience scientifique est total. »

Vous le connaissez certainement pour l’avoir vu sur les plateaux de télé, notamment à « C dans l’air », égrener ses analyses économiques en spécialiste exigeant et rigoureux. Dans son dernier livre, « France : état d’urgence », il dresse un tableau cataclysmique de la situation économique et sociale de notre pays. Avec véhémence il dénonce ces maux qui rongent notre pays  et qui le conduisent à la catastrophe qu’il pronostique toute proche si le sursaut ne se produite pas rapidement. La solidité et l’ampleur de l’argumentaire, parfois un peu touffu, donne au sombre diagnostic toute sa vérité.

Economiste, il manie les chiffres avec le talent d’un bretteur et démontre que nous vivons un « mai 40 économique ». La France vit dans une « médiocrité consentie ». les symptômes en sont le laxisme de la dépense publique, l’échec scolaire, la jalousie entretenue à l’égard des créateurs de richesse, la demande inextinguible de protection et de « droits à ».

Homme des Lumières, il identifie les raisons philosophiques, politique, sociales et spirituelles qui expliquent « cette descente aux enfers ». Le mal provient d’un mythe trompeur selon lequel nous serions entrés dans « une ère posttravail postindustrielle » qui a conduit à la « république de l’envie » depuis trente ans.

La France a ainsi raté les trois mutations décisives. Mutation technique : l’économie numérique est celle des rendements croissants, qui donnent une prime aux entreprises pionnières et rendent les retards difficiles à rattraper. Mutation financière : la dérégulation s’est certes traduite par des excès spéculatifs, mais elle a aussi donné naissance à une « finance entrepreneuriale » d’autant plus favorable à l’innovation qu’elle s’appuie sur un capital-risque abondant et des places financières puissantes. Mutation de l’espace : plus que jamais, l’innovation a besoin, pour s’épanouir, de la « métropolisation », la proximité géographique entre les acteurs de la recherche, de l’entreprise, de la finance. La France a bien tenté de créer des « pôles d’excellence », mais ceux-ci ont buté sur les dérives d’une décentralisation coûteuse et le pouvoir de « roitelets » locaux avides d’attirer les subsides publics sur leurs territoires.

Les années Mitterrand-Chirac pèsent lourd dans la balance du déclin. Sarkozy, aux prises avec la crise, a tenté de rompre avec l’assoupissement, mais il n’a pas su expliquer ni pu mettre totalement en œuvre ses bonnes intentions. Quant à « l’équipe actuelle, elle renoue avec les errements du passé, s’ingénie à faire table rase de tout ce qu’a pu faire celui qui a disparu de la liste officielle des présidents français tout en restant responsable de tous nos maux. » elle entretient la méfiance à l’égard des riches et décourage par la fiscalité le développement des jeunes entreprises. Il qualifie François Hollande de « Gorbatchev français, inconscient des terribles leviers de l’histoire qu’il actionne ».  La France est au bord du dépôt de bilan économique et moral car elle a renoncé à se battre : « puisqu’elle n’est responsable de rien. Tout est la faute des autres : la globalisation, l’Allemagne, l’euro, l’immigration… ». Un exemple qui illustre bien le mauvais chemin pris : Le Grand Paris entre dans la stratégie de constitution d’un puissant pôle métropolitain. Or que fait le gouvernement : il diffère l’enveloppe de 1 milliard d’euros qui devait constituer la première tranche de la dotation en capital de la Société du Grand Paris, remettant du même coup en cause le grand métro interrégional ayant vocation à relier les huit principales grappes productives du bassin parisien… En revanche il consacre 3,4 milliards pour abaisser l’âge de la retraite à 60 ans de certaines catégories de population (11 milliards sur le quinquennat).

Refusant le déclin, Christian Saint-Etienne propose une stratégie pour que la France redevienne une puissance rayonnante. De la réalité, on passe quelque peu à la fiction avec une Europe en fédération d’Etats européens liés par une règle d’or d’équilibre des comptes publics, un important budget commun et une interdiction de la concurrence fiscale. Il propose aussi, un système fiscal pour notre pays qui limiterait à 35% le taux maximal de l’impôt sur le revenu et à 18% celui de l’impôt sur les sociétés. Toutes choses qui ont leurs justifications mais qu’on ne voit pas comment faire entrer dans la réalité. Il décrit un « Etat stratège » dont la mission serait de déceler les filières d’avenir et d’assurer sur le long terme une compétition régulée. Il y a quelque chose de gaullien dans la vision.  Il plaide pour un nouveau pacte productif et social dans un nouveau système institutionnel en phase avec la troisième révolution industrielle de « l’iconomie entrepreneuriale. » Car pour lui « face à cette crise existentielle, il ne suffira pas de changer le modèle économique et de politique de finances publiques, il faudra aussi et surtout changer de vision sociétale et remettre l’homme libre et responsable au cœur de notre société politique, de notre économie et de notre protection sociale. » La France doit également «  désoviétiser la sphère politico-médiatico-éducative au sein de laquelle la fiscalité et la haine attisée contre les riches ont remplacé la police politique comme instrument d’oppression. »

Moyennant quoi, le pays a tous les atouts pour rebondir. On comprend cependant que pour mettre en application toutes ces idées, il faudrait d’abord un grand « boom » !

 Il n’est pas impossible qu’il se produise !

 Christian Saint-Etienne est professeur titulaire de la chaire d'économie industrielle au Conservatoire national des Arts et Métiers.



LE DENI FRANÇAIS

 

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De Sophie Pedder, chef du bureau de « The Economist » à Paris.

Un observateur étranger, une « observatrice » devrais-je dire, qui connait bien la France nous livre ses réflexions sur la perception qu’elle a de notre pays. Elle nous dit ce qui la frappe le plus : le « déni » !

Les Français sont les « derniers enfants gâtés de l’Europe » et ils n’ont pas encore découvert la crise grâce à un état providence qui les surprotège à crédit. Mais la douloureuse s’annonce inexorablement, et les quelques sacrifices consentis dans la douleur ne sont rien à côté de ce qui nous attend.

En quelques 180 pages, tout est passé en revue : le niveau de dépenses publiques trop élevé, un niveau de vie maintenu artificiellement, une croissance par la consommation financée sur deniers publics qui gonfle la dette… Faire payer les riches ? Cela ne sert à rien : ils ne sont pas assez nombreux et cela ruine l’économie.

Mais d’autres facteurs handicapent lourdement notre pays : une réglementation du travail dissuasive pour l’emploi,  une protection sociale forte de 1300 prestations qui conduit à des gaspillages inconsidérés, des politiques qui reculent devant les réalités…

Le moment arrive et elle fait la liste des vrais sacrifices qui vont s’imposer : tailler dans la protection sociale pour ne garder que ce qui est indispensable, tailler dans les dépenses publiques en réduisant le périmètre de la fonction publique trop pléthorique, alléger les impôts et les charges qui pèsent sur l’emploi….

On plaint à l’avance le gouvernement qui devra s’astreindre à cette rude besogne. Pour un peu on aimerait que ce soit les socialistes. Mais pour l’instant, ils ont pris tous les problèmes à l’envers.

A lire absolument !

 

 


C’EST UNE CHOSE ETRANGE A LA FIN QUE CE LIVRE

 

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J’ai enfin trouvé le temps de lire cet ouvrage de Jean d’Ormesson : « C’est une chose étrange à la fin que le monde ». Et je n’ai pas regretté le moment passé avec notre Académicien. On le connaît comme journaliste. On le connait, aussi comme un animateur délicieux des émissions auxquelles il participe parfois. J’avais d’ailleurs suivi une interview qui portait sur l’ouvrage en question et je m’étais promis de le lire. C’est chose faite et je ne saurais trop vous le recommander.

Jean d’Ormesson n’a pas son pareil pour se mettre à votre disposition et transformer l’infiniment compliqué en évidence simple. Son esprit subtil a concocté un plan curieux qui rend la lecture encore plus amusante. De quoi est-il question ?

Tout l’ouvrage tourne autour de questions extrêmement simples que chacun de nous se pose ou s’est posées à un moment ou un autre de son existence : « D’où venons-nous ? Où allons-nous ? Que fait-on sur cette Terre ? »

La réponse, s’il y en a une, exige d’abord que l’on suive « le fil du labyrinthe ». Un moment inoubliable qui permet de refaire le parcours de l’homme vers la civilisation, les découvertes, les vérités successives… en un échange décalé et savoureux avec « le vieux ». C’est « un monument à la gloire de la culture » si l’on en croit Frantz-Olivier Giesbert. En effet, on ne perd pas son temps, et Jean d’Ormesson trouve le moyen, par sa verve et sa modestie de nous rendre l’exposé si accessible que l’on a l’impression de participer activement à son cheminement. Et de fait nous partageons jusqu’à ses conclusions les plus personnelles. La question de fond est : y a-t-il un « dieu » derrière tout cela ?  Il permet aussi à chacun de garder ses convictions et de répondre oui ou non.

Une fois débrouillé le chemin vers la connaissance pour arriver à celle que nous avons aujourd’hui sur l’univers, l’auteur nous entraîne dans sa réflexion pour trouver une réponse à une question qui est devenue sa hantise : « qu’est-ce que je fais là ? » et à laquelle il tente de trouver la réponse. Il se servira de l’art et de la science pour alimenter sa quête. Il passe en revue les trois éléments qui nous amènent à l’hypothèse du « big-bang » : l’intelligence humaine, la lumière et le temps. Pour arriver à deux questions que nous nous posons tous au moins une fois dans notre vie : « Dieu existe-t-il ? » et     « Qu’y a-t-il après la mort ? ».

Point n’est besoin d’être philosophe pour aborder cette œuvre. C’est simple à lire. Et Jean d’Ormesson nous fait partager son intelligence avec un bonheur jamais démenti. L’art d’aborder avec l’apparence de la légèreté de graves questions. Il sait nous amuser de ses anecdotes, il nous fait partager son immense savoir avec délicatesse, nous ne peinons jamais à le suivre dans son cheminement.

Et quand on est sur la plage, la lecture en est encore plus délicieuse. Je ne vous dis pas sa conclusion. Mais je crois que chacun peut y trouver son bonheur. Quand on referme le livre, on se sent d’un seul coup plus intelligent ! Fabuleux.

 


A FEU ET A SANG

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La franchise en politique dérange. Tant pis pour les pisse-froid. Et c’est suffisamment rare pour qu’on salue l’artiste. Roselyne BACHELOT nous livre ses notes de campagne, brutes de décoffrage, les événements tels qu’elle les a vécus au fil des jours, avec les commentaires qu’ils lui inspiraient. Il y a ceux qu’elle aime et ceux qu’elle n’aime pas. C’est dit parfois carrément, mais jamais sans méchanceté. Je n’y ai jamais vu de « bashing » comme quelques médias l’ont prétendu. D’ailleurs, elle ne s’abaisserait pas à ce genre d’exercice qu’elle dénonce avec vigueur, surtout quand il s’agit de la constance des  « commentateurs » à l’égard de Nicolas Sarkozy.

A vrai dire, je n’y ai rien appris que je ne sache déjà. Beaucoup des travers de la dernière campagne présidentielle nous étaient connus, que nous les ayons soit ressentis, soit pressentis. Un éclairage utile donc, quand il nous apporte des certitudes là où nous en étions aux hypothèses, quand il décrit les relations entre le président et ses ministres et l’envers du décor de ses déplacements.

Je ne partage pas toutes ses appréciations.

Je pense que Roselyne Bachelot sous-estime l’exaspération d’une grande partie de notre électorat sur les questions de l’identité et de l’immigration. Dans mon entourage où l’on votait beaucoup « droite modérée », la tentation « Le Pen » était très perceptible. L’un de mes proches, qui habite en région parisienne,  me disait : «  il avait promis de passer le karcher, et il ne l’a pas fait. Il nous a mentis ! ». La campagne devait donc se faire sur ces attentes-là. Je n’y ai pas trouvé de concessions à l’extrême droite, mais il était fatal que les médias entretiendraient la confusion et là, on n’a pas été bons. De même, la stratégie du "ni-ni" : il n'y en avait guère d'autre possible au risque de déstabiliser un peu plus nos électeurs. Tous ceux que je connais, qui auraient voté facilement " Jospin" en 2002, disaient leur dégoût d'avoir à voter pour un socialiste en 2012, après cinq ans d'insultes et de dénigrement contre le chef de l'Etat. 

Elle sous-estime aussi les ravages de « l’assistanat » dans notre électorat des classes moyennes. Et Laurent Wauquiez a tapé juste quand il en a dénoncé les méfaits. Il aurait fallu en contrepoint montrer l’intérêt du RSA que les crises successives ont contrebattu dans ses objectifs, mais cela n’a pas été fait.

Oui, il fallait mener la bataille du bilan. Il aurait fallu le faire de façon multiple (beaucoup de porte-voix) et concentrée (marteler la liste des réformes et justifier les plus incomprises), cela pendant toute l’année 2011, sur tous les plateaux, sans s’occuper des questions inopportunes (vous avez vos questions, j’ai « mes » réponses). Et aussi en lieu et place de tous ces inutiles déplacements en province, sous haute protection, dont les thèmes n’ont jamais été correctement relayés par les médias qui se sont complus à souligner le « tri » de l’assistance.

Quant à l’électorat centriste, je pense qu’il ne structure plus rien du tout, même en Maine-et-Loire. Les églises se sont vidées et l’électorat démocrate-chrétien avec. Il s’y est substitué un vote de gauche modérée sous l’influence d’un clergé qui ne fait pas mystère de ce choix, et chez les plus jeunes, un vote écologiste. La querelle entre les centristes et la « balkanisation » politique de cet espace a fini de dissuader les derniers « mohicans ». Ainsi avons-nous perdu toutes les élections intermédiaires et l’UMP stagne à 35% : mortel dans un scrutin majoritaire à deux tours. Dommage qu’on n’ait pas saisi les avancées du Grenelle de l’environnement pour attirer une partie de l’électorat écologiste. La question de la reconquête des 15% manquants est toujours posée. Ce sera l’un des enjeux de la « nouvelle UMP ».

J’ai aimé les confidences  et les analyses toujours très pointues et argumentées, quand il s’agit de décrypter les tourments de la « porte-parole » du candidat, NKM en l’occurrence, ou de prendre parti dans le combat pour un meilleur traitement de l’autisme en France. Elle évoque avec sensibilité ses souvenirs, que j’ai partagés pour certains, et surtout on sent en permanence une grande affection pour Nicolas Sarkozy, y compris dans la frustration d’être à ses côtés sans pouvoir parler.

Et puis il y a les « perles » qui claquent comme des coups de fusil qui atteignent le cœur de la cible. Je me suis régalé au moins trois ou quatre fois.

A quoi aura servi François Bayrou ? « Rares sont les politiques dont on peut dire que, en vingt ans de carrière au premier plan, ils n’auront servi à rien. C’est le cas du Béarnais. » La suite p.233. Précis et définitif.

Mais que vient-il faire là ? Il s’agit d’Henri Guaino montant à la tribune pour faire un discours lors du meeting de Villepinte. Comme elle, j’ai trouvé le procédé ridicule. « se déroule alors une séquence ubuesque qui nous met si mal à l’aise, que malgré sa relative brièveté, elle nous paraît durer une éternité…Il ne doit pas figurer sur la photo et encore moins produire deux discours et en interpréter un. »  La suite p.152. Précis et définitif.

Comment expliquer l’atonie du militantisme classique au profit de la réaction aux dépens de l’action. La réponse se trouve entre autre dans le livret de Stéphane Hessel « Indignez-vous ! », exemple parfait de la pulsion stérile.  Une exécution que je partage et qui me conforte dans mon jugement sur ce « petit ouvrage frugal, où je ne trouve que du vent et des propositions avariées… ». La suite p. 51. Précis et définitif.

Et si vous voulez vous faire un jugement étayé et argumenté sur le programme de Hollande, le livre fourmille de passages croustillants à souhait. « En face, chez les socialistes, c’est un trou noir, une progression par le vide, qui n’est pas moins brutale… ».

Je vous laisse le soin  de découvrir la conclusion.

Et pourtant, il s’en est fallu de peu. L’énergie du bonhomme  a failli faire mentir tous les pronostics. Au Trocadéro, il a soulevé  nos cœurs. Nous n’oublions pas. (Cela, c’est moi qui le dit).

 

 


ROSE MAFIA

 

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Voilà un livre qu’il faut avoir lu, surtout si on a l’intention de voter Hollande. On y découvre un des systèmes mafieux les plus perfectionnés organisé par les élus socialistes du Pas-de-Calais. Objectif : financement de la fédération PS et aussi enrichissement personnel de certains. On y découvre les emplois fictifs, les enfants casés, les logements de complaisance…

Dans cette affaire, le maire d’Hénin-Beaumont fait figue de bouc émissaire. C’est quand il s’en est aperçu qu’il s’est mis à table, refusant de payer pour tout le monde. De toutes façons la Chambre Régionale des comptes avait déceleé déjà de quoi ouvrir des enquêtes préliminaires contre de nombreux élus. Et la juge d’instruction en charge de l’affaire avait découvert et recoupé de nombreux délits.

Tout y passe : blanchiment d’argent qui s’envole au Luxembourg, appels d’offres truqués qui servent toujours les mêmes en échange de rétro-commissions et de surtarifications, des SEM emboitées comme des poupées gigognes et support des malversations…

Pendant un long premier temps, parce qu’il croyait dans son parti, Gérard Dalongeville ment pour le protéger. Il va en prison pour que la découverte du système n’éclabousse pas le PS. Et puis il vient un moment où il se dit que « ça suffit ».

Le livre est un cri de souffrance et en même temps une confession pour décharger une conscience qui découvre qu’elle acceptait l’inacceptable.

Le résultat est évidemment stupéfiant et pose des questions sur les pratiques de certains élus. On se demande même si la direction du PS peut ne pas avoir été informée de tels déviances. Les mœurs troubles des responsables du PS du Pas-de-Calais sont-elles isolées dès lors qu’elles se produisent dans une fédération tenue par les mêmes depuis 30 ans !  On ne peut s’empêcher de faire le lien avec les Bouches-du-Rhône et d’autres fédérations…

Et peut-être bien que d’autres villes tenues depuis la même époque connaissent-elles peu ou prou les mêmes accommodements avec la légalité. L’habitude et le confort entraîne souvent la faiblesse et le laxisme… Tellement tentant !

On sait déjà que la triche fait partie intégrante des coutumes internes du PS. Il manquait la dimension corrompue. Madame est servie !

 


JPR, L’AFFECTIF

 

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Voilà un livre original a plus d’un titre. Et déjà par le titre : « Je marcherai toujours à l’affectif ». Mais Jean-Pierre Raffarin réussit un pari qui n’était pas gagné d’avance de mélanger des souvenirs de jeunesse en une sorte de chronique de la vie quotidienne des années cinquante, ceux de son parcours politique qui l’a mené de la « France d’en bas » jusqu’en haut à Matignon, avec des réflexions plus intimes à caractère sentimental et philosophique.

J’ai bien connu Jean-Pierre pour l’avoir accompagné quelques années dans sa vie politique, au temps où je militais au sein du mouvement des Jeunes Giscardiens puis au Parti Républicain et à l’UDF. Je peux même dire que nous sommes amis, bien qu’aujourd’hui nous ayons peu d’occasions de nous rencontrer, hormis les grands rassemblements politiques. Nous nous croiserons peut-être après-demain à Villepinte…C’est chaque fois un moment chaleureux partagé.

C’est pourquoi je peux affirmer que ce livre est le reflet vrai du personnage. Il respire l’honnêteté qui fait partie de l’essence profonde de Jean-Pierre, la chaleur humaine qui lui confère cette empathie naturelle, l’intelligence fine assise sur une solide éducation et formation intellectuelle. Je l’ai lu comme une gourmandise !

Il incarne la vision politique que je préfère : celle d’une droite sociale et chaleureuse, pour laquelle j’ai milité avec conviction et milite toujours d’ailleurs. Son parcours est un bon exemple de ce que la volonté et l’engagement au service de ses idées peut produire. Bien sûr, la politique, il est tombé dedans tout petit. Il l’explique très bien avec la référence constante au chemin suivi par son père. Bien souvent, cela ne suffit pas où constitue un handicap. Jean-Pierre a su en faire un atout.

Il incarne aussi une vie familiale sereine, dans laquelle là encore, je peux me reconnaître. Un cercle familial soudé est important face aux contraintes de la vie politique. Il donne de la force mais sert aussi de refuge si nécessaire. Comme souvent cela va de paire, il bénéficie aussi d’un cercle d’amis intangible. Les valeurs de l’amitié, de la confiance, de la fidélité ont ici un sens.

Une chronique, un itinéraire, et aussi une leçon de vie qui s’appuie à la fois sur ce qu’il a reçu de son cercle familial, sur son expérience acquise et sur une solide réflexion philosophique puisée chez Edgard Morin, Luc Ferry et Jean-Claude Guillebaud. Celle-ci le mènera sur les « chemins de Compostelle », mais c’est une autre histoire…

Je vous recommande cette lecture. Elle vous livrera en plus quelques clés de compréhension de notre vie politique nationale, des portraits précis mais jamais méchants, quelques petits secrets de la vie à Matignon, un regard lucide et expert sur la Chine… Je suis certain que vous ne vous ennuierez pas.

« Aime un peu ceux qui te soutiennent ! » a-t-il glissé à Nicolas Sarkozy, au cours d’un tête à tête… L’affectif !

Jean-Pierre Raffarin, "Je marcherai toujours à l'affectif" - Flammarion.

 


ET « PEAN » DANS LE MILLE !

 

Intéressante cette mise au point dans le Figaro, d’Alexandre Djouhri, l’homme d’affaires mis en cause dans « la République des mallettes » de Pierre Péan. On y découvre comment se fait le journalisme de pseudo-investigation à base d’enquête pour le moins … approximative. A force de trop vouloir prouver à tout prix, on ne prouve rien. Mais il faut penser au nombre de gogos qui croiront dur comme fer ce qui est dénoncé sans savoir que c’est sur la base de recoupements plutôt frelatés. Ainsi, on détruit le lien de confiance entre les élus et les citoyens. Volonté de nuire ou aveuglement idéologique ?

Je ne prends pas la défense d’Alexandre Djouhri, que je ne connais pas. Ce qu’il dit doit être pris en compte au moins autant que les allégations de l’auteur du livre qui le met en cause. Si c’est faux, qu’il porte plainte, pense-t-on immédiatement : l’intéressé balaie cette possibilité, arguant des facilités dont bénéficient les journalistes qui diffament pour éviter une condamnation dès lors que les juridictions leur reconnaissent facilement le bénéfice de la bonne foi, « même quand la fausseté des faits est avérée ». Ce qui est vrai et vérifiable. Et comme en plus il suffit de multiplier les précautions d’écriture en rappelant au lecteur qu’on n’a pas la preuve de ce qu’on avance et que l’on n’est pas obligé de citer ses sources qui restent alors anonymes et seules responsables des allégations, tout procès est perdu d’avance.

Ce que veut mettre en cause Alexandre Djouhri, c’est, à la lumière de faits précis cités dans le livre, démontrer que la méthode manque de sérieux et qu’on se trouve loin des pratiques du journalisme professionnel, citant l’exemple de son ami Henri Azuelos, présenté comme « abattu le 18 juin 1997 » alors qu’il est décédé d’une leucémie à l’hôpital américain… Effectivement, si tout le livre est du même tonneau ! Et de souligner toutes les contre-vérités le concernant, rendues impossibles par les dates et les lieux cités, et les personnes incriminées. Ce qui permet à l’auteur du livre, Pierre Péan, d’affirmer tout de même qu’il n’avait « jamais autant mesuré le fossé existant entre la vérité judiciaire et la vérité tout court », en laissant croire que c’est lui qui approche de la vérité en colportant des rumeurs sans vérifier, alors que la justice s’embarrasse de la recherche des preuves et serait condamnée à l’impuissance.

Une manière de procédé qui s’apparente à celle de la « Terreur de 1793 » conclut Alexandre Djouhri, en se référant à la loi votée par la convention dite « loi des suspects » qui favorisait la délation et la dénonciation calomnieuse.

On a envie de dénoncer avec lui les dérives de plus en plus fréquentes du journalisme dit « d’enquête », qui permet, certes de gagner facilement de l’argent, mais qui ne rend service ni au journalisme, ni à la démocratie. Le marché est inondé de ces livres racoleurs et de sites internet qui pratiquent les mêmes méthodes.

Si on veut dénoncer le système dit « des mallettes » qui a certainement existé, il faut étayer les accusations sur des investigations sérieuses et des faits avérés avant toute mise en cause. N’est pas Montaldo qui veut !… Ou laisser la justice faire son travail.

 


POURQUOI SARKO VA GAGNER

 A LIRE ABSOLUMENT

Pourquoi Sarko va gagner002

Comment 37 ooo "baveux" nous intoxiquent et démolissent le Président depuis 5 ans et le font passer pour un dictateur.

Eric Brunet a rendu sa carte de presse et les avantages fiscaux qui vont avec. Il préfère qu'on le désigne comme "polémiste", notamment sur RMC. Il explique comment tout a été dit pour que personne ne croie à la réélection de Sarkozy. Tout a été fait pour que les Français ignorent son action véritable.

Il nous révèle pourquoi Nicolas Sarkozy va gagner. Car tel  Du Guesclin, il arrive toujours là où on ne l'attend pas.

 

"Pourquoi Sarko va gagner"  Eric Brunet chez  Albin Michel

 


LES INTELLECTUELS FAUSSAIRES

 

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Voilà un livre qui va droit au but. Pascal Boniface ne se cache pas derrière son petit doigt pour régler leur compte à quelques experts en mensonge qui triomphent habituellement sur la scène médiatique.

Cet ouvrage vient à point nommé éclairer d’un jour particulier les nombreuses émissions où ces fameux experts ont l’habitude de prospérer. Et ils sont connus, tant ils sont prisés par les producteurs et les animateurs de plateaux.

On a aussi eu de nombreuses occasions d’y voir l’auteur. Pascal Boniface est directeur de l’IRIS (Institut de Relations Internationales et Stratégiques) et enseigne à l’Institut d’études européennes de l’université Paris VIII. C’est aussi un auteur connu pour les nombreux ouvrages sur les relations internationales qu’il a commis, les questions nucléaires et le désarmement, la politique étrangère de la France…

Dans les « Intellectuels Faussaires », il dresse, pièces à l’appui le portrait de quelques-uns de ces « mandarins » de plateaux : Caroline Fourest y est présentée comme une « sériale menteuse », François Heisbourg comme capable de tenir plusieurs discours : « qui paye la musique, choisit la partition ! », Thérèse Delpech, la spécialiste du nucléaire ayant, elle, un discours univoque dès lors qu’il s’agit de l’Irak ou de l’Iran… c’est « Madame Tapedur ». Mais C’est avec Bernard Henry Lévy que visiblement Pascal boniface vide son sac. Il en fait le « maitre des faussaires », et il n’est pas tendre avec le philosophe mondain à « géométrie variable » toujours en quête de notoriété plus que de vérité.

Ces portraits de « quelques faussaires en particulier » sont précédés d’une première partie consacrée à la « malhonnêteté intellectuelle  en général ». L’auteur y dénonce la mode des « intellectuels » qui n’existe qu’en France, la morale en trompe l’œil, l’obsession de l’Islam à travers le concept « d’islamo-fascisme » qui, selon lui, ne tient pas la route. Il voudrait ouvrir les yeux du grand public pour qu’il ne se laisse pas influencer facilement par ceux qui devraient éclairer les débats et qui ne proposent bien souvent que des arguments mensongers ou des contre-vérités.

En cherchant à dévoiler ce mécanisme, Pascal Boniface, dont on connait par ailleurs la modération des propos, ne se fera pas que des amis, parce que dans ce livre, il nous sert une version tranchée et parfois péremptoire, au moins en apparence. Ce n’est pas le moindre intérêt de cet ouvrage qui se lit par ailleurs très facilement.

Une lecture bien utile en ces temps où chaque Français aura une opinion à se faire sur bien des sujets. Autant savoir de qui il faut se méfier !

Morceau choisi : «  A tout seigneur tout honneur : BHL est certainement le modèle même du « faussaire », la maître absolu, le mètre étalon. Il a créé le prototype et en a fait une référence. Bien des fois il a trébuché sur la réalité, bien des fois ses mensonges ont été dénoncés dans des articles et des livres, mais rien n’y fait. BHL semble bénéficier de deux principes. Le ridicule ne tue plus, et ce qui ne tue pas renforce. Il a réussi le tour de force de se renforcer à chaque fois qu’il a été ridicule. Il a bâti sa carrière en maniant sans vergogne le mensonge… »

 


MARINE, AU NOM DU PERE, AU NOM DU PIRE …(2)

Marine le Pen001 Le front antinational001 

 
Marine Le Pen sait qu’elle ne peut pas gagner en 2012 à l’élection présidentielle. Tout au plus pourrait-elle améliorer le score de son père en 2002, en augmentant par une image adoucie, la porosité avec l’électorat de droite le plus conservateur, longtemps retenu par les provocations du père. Son calcul vise à éliminer Nicolas Sarkozy au premier tour pour profiter ensuite d’une recomposition politique qui, espère-t-elle, ferait voler l’UMP en éclat. Très hypothétique, évidemment. Ce qui explique la trajectoire verbale depuis le congrès de Tour au début de l’année, en profitant de l’engouement des médias. Qu'elle fasse gagner la gauche lui importe peu.

L’islamisme comme fonds de commerce

La mue ne va pas jusqu’à s’éloigner des fondamentaux xénophobes du parti. Il ne s’agit pas seulement de dénoncer l’islamisme (l’intégrisme) comme le fait toute personne attachée aux libertés individuelles, mais de faire de l’immigration musulmane un risque d’intégrisme. Pourtant l’Islam ne mène pas forcément à l’islamisme. Marine Le Pen étale une ignorance manifeste sur ce qu’est réellement la religion musulmane, les courants qui la traversent, et ignore totalement le bras de fer difficile que mènent les musulmans laïques face aux salafistes. Ramener l’Islam aux seuls intégristes, c’est faire leur jeu et de ce point de vue, elle est bien plus radicale que son père. Le Front National porte d’ailleurs une responsabilité :  en flattant le racisme antiarabe, il a contribué à la crise identitaire des deuxièmes et troisièmes générations, poussant certains dans les bras des islamistes…Ce qui apporte de l’eau à son moulin !  Et le tour de force aura été la dénonciation des prières de rue –qui vient de trouver son épilogue, mais pas grâce au FN- en les comparant à une occupation, lui permettant du même coup de relativiser les propos de son père sur l’occupation nazie. Elle joue comme toujours sur tous les tableaux : on dénonce d’un côté les prières en pleine rue, et de l’autre on utilise tous les recours contre les maires qui autorisent la construction de mosquées, même quand aucuns fonds publics ne sont engagés et que la loi de 1905 est respectée. Tellement facile !

La laïcité prise en otage

De tous les partis politiques, aucun ne compte autant de monarchistes et d’intégristes raillant la république et la laïcité, de partisans d’un régime « autoritaire » pour remettre la France « en ordre » ; et d’ailleurs le FN  a toujours manifesté » une étrange sympathie pour les dictateurs comme Sadam Hussein et encore récemment pour Ahmadinejad. « Les véritables défenseurs de la République, c’est nous ! » clame-t-elle au moment de son élection à la présidence. L’OPA sur la République et la laïcité est osée. D’ailleurs, son discours a été moins applaudi que celui de son concurrent Gollnisch. Il ne s’adressait pas aux militants présents, mais à l’extérieur, par médias interposés. Le revirement est purement tactique car ces thèmes sont très porteurs. La laïcité est une valeur revendiquée par tous les grands partis. Cela étant, Marine le Pen défend surtout « les valeurs traditionnelles de la République française » et donc il s’agit de se servir du concept de laïcité pour réaffirmer l’identité chrétienne de la France, les « traditions françaises ». Sont visés uniquement l’immigration et l’islam. Il faudra pourtant qu’elle explique pourquoi elle était contre le vote de la loi sur le port du niqab. Toujours la même contradiction : plus de voile intégral permet plus de dénonciation !

Une méthode : dédiaboliser

Priorité : être sympathique, apparaître ouverte, jouer la « transparence »… elle se fait appeler « Marine » pour faire oublier Le Pen. Elle accepte les interviewes, tente de se présenter comme la victime d’un ostracisme trop longtemps pratiqué injustement contre son père. Elle prend des positions modernes sur le PACS, se veut moins catégorique sur l’avortement, bref plutôt que le chêne, c’est le roseau qui plie et qui s’adapte pour mieux atteindre son objectif. Mais son discours use toujours de la connotation insidieuse plutôt que de s’adresser à la raison. Un discours expiatoire, à géométrie variable, selon les boucs émissaires. Le FN a été capable d’incarner les courants les plus contradictoires, flattant un jour les catholiques intégristes, s’adressant le lendemain aux païens, antijuif ou antiarabe ou les deux, c’est selon, défenseur des ouvriers… et des grands patrons. Hier ultra libéral, aujourd’hui pour les nationalisations et le retour de l’Etat qui retrouverait toutes ses vertus entre ses mains. La crise fournit son lot d’arguments : contre l’Euro, contre le « système », contre l’UMPS. Tant pis si le programme promet la retraite à 60 ans sans financement, la sortie de l’Euro avec ce magnifique tour de passe-passe d’un Euro égale un Franc. Autrement dit celui qui a mille euros aujourd’hui (soit 6500 francs) se retrouverait avec mille francs : belle opération en vérité ! Et comment renationaliser EDF sans budget ? Un programme qui aboutirait à un effondrement massif du niveau de vie, notamment pour les plus pauvres, mais l’essentiel est de faire croire. Son  programme n’a aucune importance, il s’agit de faire du chiffre électoral. Faire d’abord prospérer l’entreprise familiale et garder les clés du coffre.

Le retour aux fondamentaux à Nice.

« Une gourgandine sans foi ni loi, sans doctrine, sans idéal, sans colonne vertébrale, pur produit des médias, qui a multiplié les purges depuis des années et dont l’entourage n’est composé que d’arrivistes sans scrupules… »  Ce portrait que fait Jérôme bourbon, catholique intégriste de la présidente du Front National,  qualifié par l’intéressée de « taliban hystérique », et les résistances d’une partie de son électorat traditionnel et des militants, la candidature concurrente du scissionniste Carl Lang, ont obligé Marine à corriger le tir. D'autant plus que la digue mise en place par l'UMP avec la "droite populaire" lui complique la tâche. A Nice elle a réussi à faire la paix avec le « Bloc identitaire » à sa droite et attiré quelques personnalités comme le Villieriste Paul Marie Couteaux ou l’ancien UMP ex-FN de nouveau en cours Jacques Peyrat, tout en tentant de donner le change avec la présidence de son comité de soutien confiée à Gilbert Collard. Marine Le Pen doit trouver un nouveau souffle et sortir son parti de son image contestataire tout en ménageant son électorat de base. L'affaire des valises va lui donner sans nul doute du grain à moudre, même si le président d'honneur du parti fait partie du déballage.

Que conclure ?

Peut-on raisonnablement voter pour une candidate dont le discours évolue au gré des événements, dont le programme économique est une vraie ratatouille aux effets catastrophiques s’il était appliqué. Il faut être naïf pour croire que l’on peut tout avoir, la sécurité d’un état fort et payer moins d’impôts, l’immigration zéro et la retraite à 60 ans. Tout cela est mensonge. Peut-on avoir confiance dans un parti dont la démocratie aboutit à un compagnon, vice-président, une sœur en charge de l’événementiel, le beau-frère conseiller omniprésent… et le père toujours présent, vrai patron que la « benjamine » se garde bien de désavouer. Au vu de son fonctionnement, d'un rapport lourd à l'argent et de ses démêlés avec ses créanciers, le « tous pourris » prend une singulière résonance.

Le pire, au nom du père !

"Marine le Pen", de Caroline Fourest et Fiammetta Venner ches Grasset

"Le Font antinational", de Nathalie Kosciusko Morizet, Editions du Moment

Lire aussi :

"Un piège bleu marine" , de Laurence Parisot et Rose Lapresle, Calmann-Lévy

 


MORCEAUX CHOISIS

 Chasse au Sarko002

Une dernière série pour la route…

« ... Qui obtient, lors de la création de l’impôt sur les grandes fortunes –fierté des révolutionnaires socialistes-, l’exonération de l’outil de travail afin de ne pas saigner les riches ? La force de persuasion des deux François de l’Oréal. Qui obtient, en 1992, une ristourne sur les droits de succession de Liliane Bettencourt de l’ordre de 50 millions de Francs ?Ne répondez pas tous à la fois. Quand on songe aux hurlements qui ont accueilli le fait que l’on ait rendu  tout récemment 30 millions d’euros à la même Liliane Bettencourt, au titre du bouclier fiscal, on peut se rappeler avec douceur la loi des trois D pour en finir avec Nicolas Sarkozy : diabolisation, délégitimation, deux poids, deux mesures. … »

« Quand aux amis pas nets, aux cumuls des mandats publics et des jobs privés, aux faveurs accordées aux uns et aux cadeaux prodigués aux autres, ne pas oublier que Sarkozy, élevé dans le sérail RPR, en connaît tus les détours, et qu’il ne reste qu’un apprenti même pas sorcier en comparaison de ce qui s’est passé pendant une trentaine d’années à la mairie de Paris, dans les lycées d’Ile de France, en Corrèze et ailleurs. Quelle était belle la République des fausses factures et vraies commissions, des emplois fictifs et des vases communicants de la France-Afrique, des coffres-forts pleins de billets qui sentaient si bon l’odeur de la patrie, des valises gonflées à bloc que l’on déposait sur les bureaux municipaux(…) La gauche se rappelle-t-elle la société Urba-Gracco, source d’un vaste trafic de fausses factures, qui concernait non seulement la direction socialiste mais le financement de la campagne électorale de François Mitterrand en 1988 ?... »

Quelques autres vérités :

« … Il importe de ne pas laisser s’agiter en permanence les indignés à sens unique, pour qui toute arrestation d’un clandestin reconduit à la frontière devient automatiquement la rafle du Vel’ d’hiv, et le démentèlmeent d’un squat de sans-papiers l’équivalent de Drany et de Pithiviers, points de départs des wagons plombés pour Auschwitz. (…) C’est sous François Mitterrand qu’a été légalisée et organisée la rétention administrative en 1981 et que le Ministre de l’Intérieur, Paul Quilès a fait adopter par le Parlement en 1992, le système des zones d’attente< ; Eh oui, chers camarades, déjà, dans la France socialiste, Drancy et Pithiviers… »

«…L’islam ignore les normes fondatrices de la démocratie libérale, à commencer par la séparation entre autorité divine et guvernement rationnel, entre territoire de la religion et espace du politique…Or cette séparation fondamentale entre pouvoirs temporels et spirituels constitue quelque chose de récent et de fragile, l’aboutissement d’une longue bataille philosophique au sein de la chrétienté.(…) La France a légué au monde le merveilleux cadeau de la laïcité, ultime garant d’une véritable liberté… (…) En reprenant, -scandale des scandales- le thème de la laïcité à une élite longtemps incapable de dire quoi que ce soit sur l’islam radical, le port du voile et des signes religieux. Là encore, il a fallu attendre Sarkozy pour évoquer les violences urbaines et l’insécurité qui n’étaient dues, comme on sait, pour la gauche, qu’à la rage des laissés pour compte de l’économie… »

André Bercoff, La chasse au Sarko.

 


MORCEAUX CHOISIS

 Chasse au Sarko002

« …Autre angle d’attaque de la gauche socialiste et de la droite souverainiste à l’égard de celui qu’elles appellent souvent en privé, le nabot : sa dépendance à l’égard des USA, sa prétention à mettre ses pas dans les pas de son modèle d’Outre Atlantique, Sarko l’Américain(…)Et pourtant François Mitterrand était au moins aussi attaché à l’alliance avec Washington, même s’il avait l’habileté de n’en rien laissé paraître, avec le génie qu’on lui connaît dans l’art de la dissimulation(…)On voit que Sarkozy n’a rien inventé ni rompu, et encore moins innové. Simplement, comme toujours, il exhibe sans nuances ni limites. Franco de port. Préférons tout de même la franchise, si vulgaire soit-elle, à l’hypocrisie, si cultivée qu’elle paraisse. »

« François Mitterrand en prenant les rênes du parti socialiste dès 1971, sonnait fièrement le carillon des lendemains qui allaient enfin chanter. Il est important de se remémorer le chemin de la désespérance et de la désillusion pour comprendre la haine qui nimbe aujourd’hui Nicolas Sarkozy. Que la gauche était belle en effet sous Pompidou puis Giscard !... rappelez-vous les homélies sur l’argent qui corrompt, qui salit, qui pourrit tout. Le Front populaire se reformait, quarante ans plus tard, avec la sainte alliance des damnés du terroir et des fonctionnaires de l’enseignement, de la recherche et de l’intellect. La France socialiste, une fois de plus allait éclairer le monde. Nous passions de la nuit à la lumière.( …)Mais une fois les lampions éteints, les confettis nettoyés et les merguez cramés, il fallut se rendre à l’évidence : le capitalisme tenait toujours. Et même mieux qu’auparavant.(…) Mitterrand avait,  en barbouilleur talentueux, repeint de rose les barreaux de la cellule.(…) La gauche ne s’en est jamais remise. La preuve ? Le manifeste pour un nouveau modèle économique, social et écologique, pondu en mai 2010 par la dream team de Martine Aubry. Le disque dur n’a pas changé depuis les années 1970. Cela ressemble à s’y méprendre au Programme commun, avec une touche verte pour rallier les bobos.(…) Lautréamont a, comme d’habitude, présidé à la conception du rapport : il s’agit bien de la rencontre d’un parapluie et d’une machine à coudre sur la table à dissection. Traduction : la rencontre de Georges Marchais et de Nicolas Hulot sur la table de Colbert. Et Martine Aubry de saluer cette gauche solidaire, forte de ses valeurs (…) La gauche de la rue de Solférino est un couteau sans lame auquel il manque un manche : c’est le legs empoisonné qu’a laissé l’artiste Mitterrand à ses lointains successeurs… »

André Bercoff, La chasse au Sarko.


MORCEAUX CHOISIS

Chasse au Sarko002 
 

 

« Etre président de la Vème République, c’est être responsable de tout : des taux de chômage et d’endettement, de la hausse des prix à la pompe, du réchauffement climatique et des relations avec la Tunisie, de la sécurité sur les trottoirs et du trafic de drogue dans les cités, de l’impôt sur la fortune et des paradis fiscaux, j’en passe et des pires. Normal : cela fait partie du job, et qui a tout fait pour y arriver n’aura pas le mauvais goût de pleurer devant l’amoncellement des travaux d’Hercule. Mais c’est bien à ce propos que le facteur humain entre en jeu. La fonction suprême si on la veut prendre au sérieux, est celle d’un numéro de trapèze sans filet : en effet, il s’agit non seulement de prendre à bras-le-corps avec toute son équipe les problèmes de la nation, de l’Europe et du monde, mais aussi de ne jamais oublier que l’on œuvre sous le regard permanent de la démocratie d’opinion médiatico-sondagiaire, qui exige des résultats dans l’instant et ne sait même pas ce que patience et longueur de temps veulent dire. C’est devenu une banalité de base que de réitérer le fait que temps médiatique et temps politique sont par essence désaccordés et même opposés, et que les fausses émotions des spectateurs n’ont strictement rien à voir avec les légitimes espérances des citoyens… »

« Ainsi alla, pendant des décennies, le train des choses et les Cassandre qui lançaient des avertissements aussi lucides qu’alarmants, se faisaient doucement rembarrer ou, pire encore, étaient sanctionnés par la non-réélection pour les uns, le pantouflage pour les autres. Cela a duré jusqu’au krach mondial de 2007 – et dont les effets sont loin d’être entièrement connus et encore moins achevés – jusqu’à la redistribution planétaire des richesses et des pouvoirs où l’on voit les pays émergents prendre peu à peu la place de ceux qui régnaient indivis depuis plus de cinq siècles. Cet emmerdeur de Sarko choisit de carburer à contre-courant, en dressant l’inventaire des plaies et bosses qui nous entourent. Il le fait maladroitement, négligeant souvent exécution et application, lançant des pistes et les brouillant ensuite, se trompant de cible et revenant en arrière pour des raisons par lui seul connues, quand il ne se laisse pas polluer par des communicants et des sondages. Reste qu’il est le premier de nos présidents à ne pas cacher les seins que nous ne saurions voir et encore moins les maux que nous n’avons nulle envie d’affronter. C’est exactement là où le bât blesse les faux-culs et hérisse les citoyens que nous sommes. Il ne peut s’empêcher de dire les choses, dans le désordre peut-être, maladroitement parfois, mais il les dit. Au risque de heurter encore une fois la diplomatie des védrineurs… »

  André Bercoff, La chasse au Sarko.


A LIRE… ABSOLUMENT !

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LA CHASSE AU SARKO.

André Bercoff lance un pavé dans la mare. Ce livre est un pamphlet, mais pas forcément dans le sens que laisse entendre le titre. Le journaliste écrivain nous avait habitués à ses « humeurs » dans le Monde, le Nouvel Observateur, Libération. On ne peut pas dire qu’il soit de droite, ses nombreux écrits l’attestent. Mais peut-être que trop c’est trop et c’est en réaction au conformisme ambiant, à la pression intellectuelle des milieux journalistico-culturels qu’il commet l’ouvrage présent. Cet esprit qui se veut avant tout « libre » y dénonce l’acharnement  et l’outrance  de ce qu’il appelle « la chasse au Sarko ».

La liberté d’expression menacée ? « Heureusement, dans ce climat délétère, dans cette terreur qui vient d’en haut, de courageux samizdats montrent éloquemment que l’ère du journalisme debout n’est pas morte, loin s’en faut. Avec un courage qui défie l’imagination alors qu’elles risquent l’embastillement, l’exil ou pire encore, le chômage,  de vaillantes plumes tracent à longueur de kiosques les graffitis de la révolte depuis plus de quatre ans, bravant ainsi la dictature qui soumet la France aux pires avanies… » raille-t-il dans son prologue, ajoutant les titres vengeurs de quelques « unes » d’hebdo dont « Le voyou de la République ; Est-il si nul ? ; Cet homme est-il dangereux ? ; le président qui fait pschitt ; etc… », et « ils ont en plus l’audace de signer leurs articles ce qui prouve l’étendue de leur courage ». L’ironie se fait cinglante !

Il reprend tout ce qui se dit et écrit sur le portrait de Nicolas Sarkozy. « Donc si l’on en croit nos gazettes, le prince qui nous gouverne est un malade mental, corrompu et bling-bling, soumis à ses femmes et à ses enfants, entouré de copains, et de coquins à qui il passe tout ; en un mot comme en cent : usurpateur. Pas à sa place. Parvenu. Même pas Français de souche. Hongrois de père, Salonique sa mère. Et puis petit. Talonnettes. Et puis il bouge. Trop. S’agite. Trop. Et puis tellement vulgaire, ma chère. Cause mal. S’énerve. Trépigne. Fait pas président, quoi. Il est comme nous. Pas au-dessus de nous… » et encore ce n’est rien à côté de ce que l’on peut trouver sur internet où, constate-t-il avec effarement, les « groupes Facebook ont la fraîcheur des professions de foi où la mesure le dispute à la délicatesse », et suit une liste impressionnante de blogs tenus par « hommes et femmes, jeunes et vieux, rappeurs de banlieue et bobos du 16ème, chercheurs du CNRS et sociologues des hautes études, collégiens préoccupés par leurs retraites et nonagénaires en mal d’indignation… » dont les titres d’articles relèvent « du lynchage grand format », relevant au passage cette accusation d’Edwy Plenel qui traite le président de « délinquant constitutionnel », ajoutant à son adresse : « compliment qu’il n’avait pas décerné à François Mitterrand quand celui-ci l’avait fait mettre sur écoutes téléphonique… »

Et de fait, André Bercoff n’hésite pas à montrer l’hypocrisie et les nombreuses contradictions d’une gauche oublieuse de ses propres turpitudes, souvent plus lâche que courageuse. Il n’hésite pas non plus à dénoncer  « le sommeil » de nos élites de droite comme de gauche face à la nécessité des réformes ou à la prise en compte de certaines réalités. Ce qu’on ne peut pas reprocher à l’actuel président.

Alors, un livre à la gloire de Nicolas Sarkozy ? Non pas. Les défauts bien connus du président y sont exposés, sans concessions. Mais au moins, le portrait est-il équilibré. Avec en supplément, une analyse pertinente de la situation politique de notre pays, de ses problèmes sociétaux et des enjeux internationaux.

Bref, que l’on soit sarkophile ou sarkophage, il faut absolument le lire, ne serait-ce que pour remettre les choses à leur vraie place. Ce que réussit André Bercoff avec son talent bien connu et sa verve habituelle.

 La chasse au Sarko, André Bercoff, aux Editions du Rocher. 17€ - N'hésitez pas à la demander, car il n'est pas toujours exposé... allez savoir pourquoi ?

 


LECTURES D’ETE

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POPULISMES : LA PENTE FATALE

 

Dominique Reynié est professeur à Sciences Po et Directeur Général de la Fondation pour l’Innovation Politique. Il est l’auteur de nombreux ouvrages sur l’opinion publique, la vie politique française et européenne. Il analyse ici la montée en puissance, à l’ouest comme à l’est de l’Europe, des mouvements politiques populistes et xénophobes.

L’intérêt de cet ouvrage c’est de montrer comment, au-delà de la diversité des environnements politiques propres à chaque pays, ces partis, souvent protestataires, se nourrissent de réalités comparables : sentiment de déclassement vécu par les européens face aux nouvelles puissances émergentes, vieillissement démographique, crise de l’état protecteur et surtout, sentiment d’une perte d’identité face à l’afflux d’immigrés de confession musulmane.

Cet ouvrage se nourrit d’un relevé très nourri des résultats électoraux dans les différents pays du continent pour étayer son analyse de la transformation idéologique de partis appartenant au départ aux bords extrêmes de l’échiquier politique pour devenir peu à peu centrés sur les thèmes plus « convenables »  du populisme patrimonial.

A l’aide de nombreux exemples, telle l’affaire des caricatures de Mahomet, il montre à quel point l’immigration et l’Islam peuvent se trouver liés à une menace pesant sur l’identité européenne, mettant en avant aussi, la multiplication des accommodements ethnoculturels. La réaction à ce multiculturalisme favorise l’émergence d’une défense conservatrice et virulente d’un patrimoine matériel qui est le niveau de vie, et d’un patrimoine immatériel qui est le style de vie. Ce populisme moderne se nourrit évidemment la défiance envers les élites (exemple l’UMPS)  et l’antifiscalisme sans atteindre toutefois  les délires du Tea Party américain, il cultive aussi l’euroscepticisme et l’islamophobie mais se différencie par sa nature avant tout « inquiète » et individualiste, des extrémismes traditionnels dont il tente de rejeter la dimension raciste.

Mais l’ouvrage analyse aussi en profondeur les tourments de l’Europe, confrontée à son vieillissement, qui a peur de l’immigration et pourtant ne pourra pas s’en passer, qui tremble devant la mondialisation vécue comme une menace alors qu’elle est la deuxième puissance du monde par son PIB cumulé. Il met en lumière le conflit des identités entre un contient chrétien devenu laïc et une immigration musulmane qui refuse d’en assimiler les valeurs au profit des siennes. Dès lors le populisme pourrait être une pente fatale car en venant troubler le jeu normal des alternances des partis de gouvernement, il conduirait au les pays européens au repli, à des politiques malthusiennes de l’immigration compromettant du même coup le bon fonctionnement des systèmes d’assurance sociale.

Dominique Reynié propose aussi une autre vision : celle d’un « vivre ensemble » fondé sur l’idée d’une diversité libérale et démocratique réaffirmant l’attachement aux droits de la personne. Il voit dans «  l’Euroméditerranée » une région mondiale d’une puissance considérable avec un milliard d’habitants et le tiers du PIB mondial. Une manière de garantir notre avenir dans l’économie globalisée. Voilà une réponse d’envergure à la menace populiste. La réponse se trouve aussi dans l’européanisation des grandes politiques publiques qui permettrait des économies d’échelle.

Mais c’est clair, le multiculturalisme est un échec et le laisser faire ne fera qu’aggraver la pression populiste… et notre déclin avec. Un ouvrage qui éclaire singulièrement le débat sur l’identité nationale et le positionnement de l’UMP et de Nicolas Sarkozy, en lui donnant raison ; et tort au « vivre ensemble » préconisé par le PS et Martine Aubry qui n’est pas à l’abri de cette même pression.

A lire absolument.

« Populismes : la pente fatale », chez Plon, collection tribune libre.

 

 

 


BONNES NOUVELLES DES CONSPIRATEURS DU FUTUR

 

 Bonnes nouvelles du futur001

Michel Godet, exemples à l’appui, s’est donné pour but de nous montrer que les Français ont tort d’être pessimistes. Economiste et enseignant au CNAM, il a recensé toutes les « bonnes nouvelles » et toutes les bonnes pratiques à adopter pour voir l’avenir avec un œil moins morose. C’est que la France est « un pays merveilleux », plein d’entrepreneurs géniaux et efficaces, de familles formidables, de villages partis à la conquête du monde.

L’essai qu’il nous propose, après une première partie  dans laquelle il nous rappelle un certain nombre de réalités « objectives » et chiffrées et propose les clés de la réussite, rassemblant un certain nombre de chroniques et de point de vue, les parties suivantes nous racontent quatorze réussites toutes différentes qui témoignent de la vitalité créative et du dynamisme économique qui existent encore en France.

Michel Godet termine par 12 conseils pour penser et agir autrement. Il est convaincu que le mal est en nous et donc la solution aussi. Il rappelle que notre niveau de vie a augmenté de 50% depuis 1980 : « nous sommes plus riches mais aussi plus malheureux, car c’est un trait bien français, nous sommes une société de l’envie et de la frustration ».

Ces réussites n’empêchent pas qu’il a fallu souvent soulever des montagnes d’obstacles : « La « France d’en haut » impose les charges excessives d’une société de l’assistance bureaucratique et des fonctions territoriales pléthoriques. Les entreprises doivent ainsi courir dans la compétition internationale avec des semelles de plomb ». (la fonction publique territoriale a encore augmenté ses effectifs de 67 000 emplois en 2010 !). Les causes de nos difficultés sont d’abord internes et «l’impact de la globalisation sur nos économies doit être fortement relativisé… ». l’auteur rappelle que nos dépenses publiques par rapport au PIB sont de 6 points supérieures à la moyenne communautaire, « c’est dire aussi que nous avons un gisement potentiel d’économie de l’ordre de 120 milliards d’euros ! ». Sans réduire le champ de l’action publique, il est possible de la renforcer dans les domaines essentiels tels que éducation, santé, logement, sécurité, justice, pour peu que l’on évalue les politiques publiques nationales et territoriales en s’attachant à « ne pas confondre service public et statut public des agents qui le rendent. »

Bonnes nouvelles des conspirateurs du futur chez Odile jacob.

 

 


"LES TRENTE GLORIEUSES SONT DEVANT NOUS" !

 

Les trente glorieuses001 

 
Voilà un essai au titre résolument optimiste puisqu’il fait référence aux 30 années de croissance continue que la France a connue après la 2ème guerre mondiale. Les auteures, une ingénieure « Ponts » et une ancienne du ministère de l’Economie, aujourd’hui directrice des études pour un groupe international, sont deux trentenaires qui croient en l’avenir et qui pensent que notre pays a tous les atouts pour connaître une nouvelle période de croissance d’ici à 2040. Fine connaisseuses de l’économie de terrain, elles ont vécu la crise de l’intérieur. Elles en tirent des leçons et nous livrent leur vision résolument en opposition avec la sinistrose ambiante.

Les conditions qu’elles mettent pour réussir le pari qu’elles font ne sont pas inaccessibles. Elles partent du principe que les mêmes causes provoquant les mêmes effets, il convient de revenir à la recette qui a si bien réussi à la France au sortir de la guerre : retour à l’Etat stratège qui prend des risques aux côtés des entreprises. Le coeur du dispositif est un « business plan » clairement chiffré qui porte sur 90 milliards d’euros d’investissements publics en trois ans. Un remède de cheval susceptible de générer la croissance qui en permettra l’amortissement.

Cinq priorités.

Il s’agit de placer la France en position d’excellence dans cinq domaines : l’énergie, la santé, les transports, l’agriculture et surtout l’éducation. Financé au 2/3 par la dette, ce plan impose de jouer serré et une certaine cohésion nationale. Il s’inscrit évidemment dans une ambition européenne partagée. On trouve au détour des réflexions quelques bonnes idées, comme celle de faire avancer l’Europe dans la voie de la cohésion fiscale avec la création d’un « serpent fiscal » comme il y eut le « serpent monétaire » prélude à l’euro. L’axe franco-allemand est clairement privilégié.

Ces deux trentenaires sont imprégnées de la culture républicaine et on serait tenté de dire qu’elles sont les purs produits de ce que notre système éducatif était capable de former : valeurs, attachement à la devise « liberté-égalité-fraternité » qu’il faudrait remettre au centre de toute l’action politique. La marche vers la prospérité s’appuyant sur un mélange savamment dosé de dirigisme et de libéralisme économique est bien dans l’esprit actuel d’après-crise.

Hors croissance point de remède.

Voilà une tentative intéressante par son discours tonique, toujours accessible, et finalement assez réaliste. La mondialisation y est présentée plus comme une opportunité qu’une punition, et la croissance comme le meilleur moyen de sortir la France de son endettement et maintenir le niveau de vie des Français.

« Les Français sont tellement habitués à vivre dans l’idée de la crise permanente qu’ils ne peuvent imaginer que le pire pour l’avenir. Or, même sans réformes d’ampleur, avec des politiques bricolées par une succession de rustines, le pire n’est pas le plus probable, et de loin. »

Les trente glorieuses sont devant nous, Karine Berger, Valérie Rabault  - ed. rue fromentin.


L’ETAT DANS L’ETAT

 

Fonctionnaires contre l'état001 

Décidément les réquisitoires fleurissent au printemps comme les fleurs sur les cerisiers. Voici un ouvrage qui est une enquête approfondie sur le monde des fonctionnaires. Son titre : « Les fonctionnaires contre l’état – Le grand sabotage ». C’est un programme à lui tout seul. L’auteur, Agnès Verdier –Molinié, journaliste économique et directeur de la fondation de recherche IFRAP, s’y livre à un réquisitoire sans appel contre ce qu’elle n’hésite pas à appeler le « lobby le plus puissant de France ». Ces hommes, 5 millions de fonctionnaires bien organisés, censés servir l’intérêt général, sont  surtout coalisés pour leur seule rente de situation.  Vous ne le croyez pas ? Lisez …

Tout est passé en revue : comment l’intérêt général est détourné à leur profit, pourquoi la grève est si fréquente, de quels privilèges ils jouissent malgré la crise, par quel sortilège ils vivent au-dessus de nos moyens, pourquoi les syndicats n’ont pas besoin d ‘adhérents, ou encore comment ils prolongent leurs congés…

On y apprend que contrairement à l’idée répandue, les fonctionnaires ne sont pas sous-payés : « … on retrouve toujours un net avantage pour le public, avec une moyenne de 2085€ nets par mois contre 2069 € nets par moi dans le privé en 2008 » (Insee) p.72 . Mieux encore, le « détricotage » des 35 heures a été aussi adapté au secteur public : « la double exonération fiscale et sociale des heures supplémentaires représente un effort financier considérable pour le Trésor. En effet, le projet de budget 2008 chiffrait pour la seule fonction publique d’Etat, à 250 millions d’euros le coût pour la collectivité… » et la majoration de 25% est acquise dès la 1ère heure !

Vous y apprendrez que pour l’ensemble de la fonction publique, il existe entre 13 250 et 26 500 équivalents temps plein dans les syndicats. Un coût représentant entre 500 millions et un milliard d’euros par an. C’est ainsi que les principales organisations affiliées à la CGT compte 350 000 membres issus du secteur public pour 137 000 seulement du privé…

Un ouvrage à lire absolument avant la prochaine élection présidentielle. Vous comprendrez pourquoi il est impératif de réduire les effectifs d’une fonction publique pléthorique et budgétivore sur le dos des citoyens.