HISTOIRE
CHOMAGE / RETRAITES : LA MACHINE INFERNALE
LA MAREE HUMAINE

LE « VIEUX » CONTINENT.

 

Europe324

L’Europe n’a jamais aussi bien portée son nom. Mais on devrait dire le continent des « vieux ».

L’évolution démographique est un enjeu majeur de transformation des sociétés européennes.

A première vue, les différences entre la France et l’Allemagne sont frappantes à cet égard. La population française croît, celle de l’Allemagne décline. Mais le vieillissement de la société ne peut pas être enrayé, ni en Allemagne ni  en France. Nous vivons tous plus longtemps et en meilleure santé. C’est la plus grande réussite de la civilisation de l’histoire contemporaine. Ce qui nous oblige à faire face aux répercussions sociales et économiques de cette évolution démographique et trouver des solutions pour l’atténuer à l’aide de mesures économiques. La réduction drastique de la dette qui nécessite le démantèlement d’un Etat providence exorbitant fait partie des nécessités et est inéluctable.

La tâche est cependant rendue difficile parce que l’économie européenne est plus que jamais divisée en deux mondes qui ne partagent ni les mêmes résultats ni les mêmes perspectives, comme le montrent les derniers chiffres du chômage et l’indice de confiance économique publiés au début de la semaine. Si le chômage a atteint un record historique, à 11,8 % en novembre c’est à cause de l’explosion des destructions d’emplois dans la partie sud de l’Union européenne : en Espagne, qui subit, après la Grèce, la plus forte dégradation sur un an et où le taux de chômage atteint 26,6 %, mais aussi au Portugal (16,3 %) et à Chypre (14 %). La violente cure d’austérité à laquelle ces pays ont été soumis se paie aujourd’hui très cher sur le plan social.

Néanmoins, il s’agit avant tout d’engager une dynamique de croissance à l’échelle européenne.

D’ailleurs l’OCDE indique sa préférence pour moins de coupes dans les dépenses publiques à court terme et plus de réformes structurelles, visant à libéraliser l’économie et notamment le marché du travail. Nous avons besoin de croissance pour que les générations futures aient autant de marge de manœuvre que possible et pour atténuer les luttes à venir quant à la répartition des richesses. La pénurie de main-d’œuvre pourrait poser de grandes difficultés à cet égard : en Allemagne, à cause du recul de la population active ; en France, à cause de l’exploitation déficiente des réservoirs de main-d’œuvre existants. Les mots-clefs de cette problématique sont « préretraite » et « intégration insuffisante des immigrants dans la vie active ». L’espoir que les problèmes liés au marché de l’emploi seront résolus grâce à une immigration supplémentaire ne peut que partiellement apaiser la situation.

Grâce à un système de garde d’enfants, les Françaises parviennent visiblement à mieux concilier travail et vie familiale que les femmes vivant dans d’autres pays, comme en Allemagne. Ainsi, la population française devrait dépasser celle de l’Allemagne d’ici la moitié du siècle. Cependant, même si l’on considère que les familles et les enfants jouent un rôle déterminant dans la société, même si des aides financières supplémentaires sont débloquées et même si le nombre d’infrastructures de prise en charge des enfants s’accroît, la croissance démographique allemande peinera à augmenter de façon significative. Les obstacles démographiques y sont trop importants, tout simplement parce que de nombreuses mères, qui auraient pu mettre au monde de nombreux enfants, ne sont pas nées.

Les plus optimistes veulent voir dans le redressement progressif de l’économie américaine et la légère reprise de l’activité chinoise une planche de salut pour la zone euro. Le moral des chefs d’entreprise et des consommateurs s’améliore d’ailleurs, tranchant avec les résultats du chômage. D’autres prévisionnistes se montrent plus prudents en rappelant que les commandes industrielles allemandes ont chuté en novembre à cause de la faiblesse de la demande dans la zone euro. Les ventes au détail, en hausse de 0,1 % en novembre, laissent les ventes en deçà de leur niveau de l’année dernière.

Le vieillissement des sociétés n’a rien de menaçant si nous changeons de cap à temps.

De nombreuses ressources pour la croissance et l’emploi sont encore inexploitées. Nous devons seulement comprendre qu’une époque touche à sa fin.

L’Europe peut assumer ce choc démographique.

Mais la France et l’Allemagne doivent, pour des raisons différentes, aider davantage les individus qui se retrouvent toujours jusqu’à maintenant plutôt en marge du marché du travail : les femmes, les jeunes, les jeunes seniors et les immigrés.  

Les femmes : en plus de la question de la conciliation de la vie de famille et du travail, l’une des premières priorités est la question d’une égalité accrue des chances. Aujourd’hui encore, trop de femmes tournent le dos à leur carrière professionnelle en dépit d’excellentes qualifications. Nous ne pouvons plus nous permettre ce gaspillage de potentiel.

Les jeunes : Dans le chômage qui traverse l’Europe et touche maintenant près de 26 millions de personnes (18,7 pour la zone euro), la jeunesse est en première ligne, et particulièrement en France où plus de 500 000 jeunes sont sans emplois. La libéralisation du marché du travail est une clé importante pour leur intégration, mais il faut aussi faire un gros effort de rééquilibrage des formations vers celles qui valorisent l’apprentissage professionnel. Autrement dit une révolution intellectuelle que les allemands n’ont pas à faire, ayant opté pour cette solution il y a très longtemps. L’accord à minima qui vient d’être signé entre les partenaires sociaux va dans le bon sens. Il n’est pas suffisant.

Les jeunes seniors : l’espérance de vie augmente, entraînant un accroissement rapide de la durée de la troisième période de vie. Plus de personnes âgées perçoivent leur retraite sur une période de temps plus longue. Dans le contexte de la crise persistante sur les marchés financiers et de la difficile consolidation des budgets nationaux, il est de plus en plus difficile de protéger financièrement les générations plus âgées. La solution est évidente : les salariés plus âgés doivent travailler plus longtemps. L’âge de la retraite à 67 ans devra encore être probablement repoussé. Cela n’a rien de menaçant si l’on sait qu’il est important d’avoir un esprit vif et un corps alerte pour vivre longtemps. La France ne tirerait pas profit de son avantage démographique si un retour à la retraite à 60 ans était décidé. Et l’Allemagne doit maintenir sa décision de fixer l’âge de départ à la retraite à 67 ans.

Les immigrés : la part de personnes issues de l’immigration dans nos sociétés est importante ; en France, elle est même de 20 %. Les difficultés, pour l’évolution économique à venir, seraient moindres si dans les deux pays les offres d’intégration étaient plus courageuses et si le niveau de qualification des enfants issus de l’immigration était sensiblement amélioré. Le potentiel pour la croissance est immense à ce niveau également.

Les nouvelles frontières du projet européen : un moyen de relever le défi du vieillissement.

Maintenant que le péril de l’explosion est conjuré, avec les avancées d’intégration significatives que sont le traité de stabilité et le fonds monétaire commun (MES), l’Europe peut chercher à atteindre une nouvelle frontière, effort indispensable pour surmonter la faiblesse du vieillissement de sa population : Europe sociale, Europe des citoyens, Europe de la connaissance, Europe de la défense et de la diplomatie, Europe de la recherche et de la technologie, … sont encore embryonnaires et à concrétiser. Pour développer son économie et influer sur les affaires du monde, il est évident qu’une souveraineté partagée, comme nous avons su le faire pour la monnaie, est une souveraineté retrouvée.

Face au monde globalisé d’où émergent les nouvelles puissances économiques et politiques, nos souverainetés nationales isolées ne peuvent rien. C’est ainsi que nos valeurs auront une chance de se maintenir et nos pays de retrouver la prospérité.

 

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