HISTOIRE
CAC ET COUAC
ARCHIBALD SUR LE PONT

« Supprimer l'ISF pour réduire les inégalités »

 

Je verse au débat sur la réforme fiscale cette intéressante prise de position de Pierre Méhaignerie, réputé pour sa fibre sociale et son sens de l’équité, publiée aujourd’hui dans « Les Echos » (Propos recueillis par Pierre-Alain Furbury).

Pierre Méhaignerie

Pierre Méhaignerie est le Président UMP de la commission des Affaires Sociales de l’Assemblée Nationale.

Des deux scénarios avancés par l'exécutif, un allégement de l'ISF ou son remplacement par une taxation de l'enrichissement, lequel a votre préférence ?

Le débat n'est pas clos. Techniquement, je ne vois pas comment faire pour taxer l'enrichissement. C'est une usine à gaz. En ce qui me concerne, je souhaiterais la suppression totale de l'ISF, ou à défaut la suppression de l'ISF sur les entreprises familiales et le capital productif. Je suis d'ailleurs convaincu que, en cas d'alternance, le PS ne reviendrait pas sur cette mesure. Cette réforme peut tout à la fois accroître notre efficacité économique, créer plus d'emplois et, par là même, réduire l'inégalité majeure qui est, en France, le chômage. L'ISF limite la capacité des PME familiales à s'agrandir. J'ai vu trop d'entreprises être vendues lors du changement générationnel, lorsque les enfants n'assurent pas la gestion de l'entreprise et doivent payer l'ISF. Or maintenir la pérennité des entreprises familiales est le meilleur moyen de conserver et d'accroître nos emplois. En outre, l'ISF accélère les délocalisations, toujours au détriment de nos emplois. La perte de recettes annuelles dues au départ des capitaux représente davantage que les recettes annuelles de l'ISF. Alors que nous avons tous les atouts d'une nation prospère, l'ISF, tel qu'il est appliqué, est un des obstacles à la croissance.

Mais cette suppression de l'ISF ne serait-elle pas mal perçue par l'opinion publique ?

Je sais qu'il n'est pas facile de dire à la France des salariés et des ouvriers, à ceux qui ont des fins de mois difficiles, que la suppression de l'ISF est un des éléments qui permettra à notre pays d'avoir un chômage réduit et une plus forte croissance. Mais c'est pourtant la vérité, à condition bien sûr que la perte de recettes n'aggrave pas nos déficits et qu'elle soit compensée, à l'euro près, non pas par la classe moyenne mais par les catégories les plus favorisées. Lorsque, dans les réunions publiques, l'on explique que l'ensemble des pays européens ont supprimé l'ISF et que les seuls pays qui l'ont maintenu - la Norvège et la Suisse -ne l'imposent que sur l'immobilier et pas sur l'entreprise, ça fait réfléchir les gens... Il est vrai que, à quelques mois des élections, la pédagogie est difficile à faire. Les slogans salivaires martelés ont davantage d'impact.

L'exécutif a-t-il eu tort de lancer cette réforme si tard dans le quinquennat ?

Il aurait bien sûr fallu la faire plus tôt.

Comment financeriez-vous la suppression de l'ISF ?

Le coût n'est pas excessif. Elle serait financée en partie par la disparition du bouclier fiscal, la création d'une nouvelle tranche d'impôt sur le revenu pour les hauts revenus, et un plafonnement encore plus sévère des niches fiscales et sociales. Il est aussi possible de taxer davantage certaines formes d'épargne aujourd'hui exonérées.

Mais le gouvernement a exclu une nouvelle tranche d'IR, au nom de la valeur travail...

Au-dessus de 150.000 ou 200.000 euros, une part importante du revenu vient du patrimoine et pas du travail.

La percée de Marine Le Pen dans les sondages est-elle préoccupante ?

C'est bien sûr inquiétant. Il faut démontrer à nos concitoyens que le programme financier et économique défendu par Marine Le Pen ne tient absolument pas la route et aurait de graves conséquences, notamment pour les catégories populaires. Par ailleurs, qui, aujourd'hui, peut affirmer que c'est en sortant de l'euro et en fermant les frontières qu'on réglera les problèmes de notre pays ? Ceux qui se déclarent en faveur de Marine Le Pen veulent surtout exprimer un mécontentement, une insatisfaction vis-à-vis des élites politiques et économiques qu'ils jugent trop éloignées de leurs préoccupations, ainsi que certaines craintes face à la mondialisation et à l'immigration.

Que doit faire la majorité ?

Nous ne devons pas sous-estimer ces préoccupations concrètes et devons y apporter des réponses rapides et efficaces, dans le respect des valeurs républicaines. Il faut faire de la pédagogie et surtout obtenir des résultats concrets en matière économique, ce qui est difficile en période de crise. Angela Merkelen Allemagne ou Barak Obama aux Etats-Unis ont aussi des difficultés avec leur opinion publique. Je pense que la France a beaucoup d'atouts, pourtant, dernièrement, un sondage faisait apparaître que les jeunes Français étaient parmi les plus pessimistes au monde. Nous devons lutter contre cette tendance et leur donner des raisons d'espérer. Faisons preuve de davantage d'optimisme.

….

Commentaires

Vérifiez votre commentaire

Aperçu de votre commentaire

Ceci est un essai. Votre commentaire n'a pas encore été déposé.

En cours...
Votre commentaire n'a pas été déposé. Type d'erreur:
Votre commentaire a été enregistré. Poster un autre commentaire

Le code de confirmation que vous avez saisi ne correspond pas. Merci de recommencer.

Pour poster votre commentaire l'étape finale consiste à saisir exactement les lettres et chiffres que vous voyez sur l'image ci-dessous. Ceci permet de lutter contre les spams automatisés.

Difficile à lire? Voir un autre code.

En cours...

Poster un commentaire

Vos informations

(Le nom et l'adresse email sont obligatoires. L'adresse email ne sera pas affichée avec le commentaire.)